Le procès d’un conseiller de l’ambassade iranienne, qui aurait le 27 novembre commandité depuis Vienne un attentat à Anvers en Belgique, a débuté dernièrement. Les services de renseignement européens sont en effet sur le qui-vive.
Il y a quelques mois, un détenu soupçonné d’avoir des liens avec les services secrets de la République islamique d’Iran s’est présenté au personnel d’une prison de Beveren (Belgique), près d’Anvers en demandant de parler à la police.
Au cours de la conversation avec les policiers, il leur a dit que de mauvaises choses pourraient se passer en Belgique si son procès devant la justice belge tournait mal. Il leur a indiqué également qu’il existe des groupes armés gérés par des Iraniens en Irak, au Liban, au Yémen et en Syrie et qui suivent le déroulement de son procès. « Ils observent de loin si la Belgique va le soutenir ou non », selon un rapport interne élaboré par la police après la réunion.
Ensuite, le prisonnier a été guidé de la salle des réunions vers sa cellule dans la prison à haute sécurité à Schaarbeekstraat 2.
Depuis ce jour du mois de mars, l’inquiétude, déjà importante en Europe, s’est encore amplifiée. Il s’agit de l’inquiétude par rapport au terrorisme iranien, qui causait dans les décennies précédentes de nombreuses victimes. Cette crainte est due au fait que la République islamique enverra non seulement ses forces spéciales aux pays voisins dans le monde arabe pour déclencher des guerres par procuration mais également en Europe.
Les services de renseignement en Europe suivent l’opération de très près
Le coup d’envoi du procès de l’Iranien Assadollah A., âgé de 48 ans, a été donné le vendredi dernier à Anvers. Les groupes armés au Moyen-Orient, mais aussi la plupart des services de renseignement européens vont certes suivre le processus de très près. Selon le parquet, les fils d’un complot terroriste ont été tissés sur le sol européen durant ces dernières années au Palais viennois de la Jaurèsgasse à l’ambassade d’Iran.
Il s’agit de noter que ce procès dépend politiquement des relations tendues de l’Iran avec l’Occident. Les documents du procès révèlent qu’une enquête internationale d’une grande envergure a été effectivement menée. Mais les résultats ont été contestés par Assadollah A., comme son avocat belge l’a annoncé.
Selon les rapports, le diplomate iranien aurait été venu, d’une façon pacifique et discrète en Europe en tant que fonctionnaire muni d’un passeport diplomatique. Depuis 2014, il a été accrédité en tant que troisième conseiller à l’ambassade de la République islamique à Vienne. Cependant, les enquêteurs croient qu’il fait partie des services de renseignement iranien et qu’il a été envoyé dans une mission pour diriger « les ressources humaines » en Europe.
Il est à rappeler qu’à l’été de 2018, les États-Unis ont annoncé leur retrait de l’accord nucléaire conjoint avec l’Iran et ont décidé de nouvelles sanctions à son encontre. Cela a poussé les jeunes mécontents et la classe moyenne de protester dans les rues d’Iran, mais les forces de sécurité ont réagi avec violence aux protestations croissantes.
Entretemps, Assadollah A. aurait planifié un attentat depuis sa base de Vienne contre une réunion d’Iraniens pro-occidentaux en exil en Europe. Il s’agit en fait d’un groupe d’exilés iraniens qui œuvraient depuis longtemps pour renverser le régime iranien. Parmi les invités les plus importants à la réunion : Rudy Giuliani, l’avocat du président américain Donald Trump.
Les enquêteurs de l’UE sont convaincus que le conseiller présumé Assadollah A. a agi sur les instructions de Téhéran. «Le projet d’attentat a été planifié et promu par l’Iran au nom de l’Iran. Ce n’est pas une initiative privée de A. » selon un message des services de renseignement belges, VSSE.
Les rapports ont indiqué que Assadollah aurait ramené 550 grammes du TATP, un puissant explosif, dans sa valise diplomatique en Europe. Il s’agit d’une substance très populaire auprès des terroristes car elle est relativement facile à fabriquer à l’aide des substances chimiques disponibles. Selon un expert de la police belge, la bombe d’Assadollah A. aurait été fabriquée « d’une façon très professionnelle » avec une puissance d’explosion susceptible de tuer de nombreuses personnes à la fois.
Selon les dossiers d’accusation, Assadollah a ensuite contacté un jeune couple d’origine iranienne. Il s’agit de Amir S., 40 ans, et Nasimeh N., 36 ans, installés en Belgique depuis longtemps et ils ont également la nationalité belge. Les enquêteurs supposent qu’ils travaillaient en 2007 pour le compte des services secrets iraniens contre des dizaines de milliers d’euros.
Le 28 juin 2018, le jeune couple s’est rendu discrètement au Luxembourg, où ils ont rencontré Assadollah A. Ils l’auraient également rencontré ces dernières années dans d’autres villes européennes particulièrement pittoresques dont Milan, Venise et Salzbourg.
Selon le parquet, le conseiller présumé a fait minutieusement apprendre au couple les instructions. Ils auraient utilisé plus tard des mots codés lors de leur discussion du plan de l’attentat. Le couple terroriste a évoqué à leur maître la « Playstation », pour faire allusion probablement aux explosifs, qui était connectée à la « télévision », qui signifiait peut-être que le détonateur à distance a été installé qu’Assadollah A. avait également remis au couple dissimulé dans une mallette de maquillage.
Assadollah avait reçu un message disant : «on gagnera la coupe». Pour sa part, il a promis de d’informer personnellement l’«Agha» à propos de l’opération réussie. Les enquêteurs supposent que le concerné est un haut responsable dans les services de renseignement iraniens ou même le chef religieux iranien, Ali Khamenei.
Mais est-ce que c’est vrai? Car le gouvernement iranien rejette toutes ces hypothèses. « Le diplomate est la victime d’un complot des groupes qui s’opposent à l’amélioration des relations de l’Iran avec l’Allemagne et d’autres pays européens », a indiqué le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères. L’Iran indique aussi que ce sont les exilés iraniens pro-occidentaux qui voulaient planifier un attentat contre eux-mêmes.
Mais ce qui est sûr, c’est que les 550 grammes d’explosifs ont été saisis après avoir été dissimulés en Belgique. Le jeune couple Amir S. et Nasimeh N. étaient sur le point de commencer leur voyage vers leur cible à Paris quand les forces spéciales belges les ont attaqués et arrêtés. Au début, le couple s’est montré coopératif et a déclaré avoir été mandaté par Assadollah A. mais ils ne connaissaient pas le patron de Assadollah à l’ambassade de l’Iran à Vienne que sous le pseudonyme Daniel.
Si un tribunal européen décidait que le régime iranien avait vraiment chargé Assadollah A. de l’attentat, cela va nous rappeler les moments les plus sombres, entre 1979 et 1994, lorsque la CIA a dénombré plus de 60 tentatives d’attentats contre des opposants au régime iranien, dont beaucoup en Europe. La tentative d’assassinat la plus spectaculaire concernait quatre politiciens irano-kurdes en exil dans le restaurant berlinois «Mykonos» en 1992 qui a failli entraîner la rupture des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Allemagne.
Les diplomates européens ont espéré longtemps que l’Iran se serait rendu compte que le prix de tels actes terroristes va être trop cher. En effet, ils ne devaient donc pas être commis, du moins en Europe.
L’affaire de Assadollah A. soulève la question autour du retour de Téhéran aux anciennes méthodes sanglantes puisque il y a eu des signes inquiétants ces dernières années. Il s’agit de l’ancien politicien du SPD et président de la société germano-israélienne, Reinhold Robbe, qui avait été espionné par un agent iranien. Le Tribunal de Berlin est convaincu que cette affaire d’espionnage avait pour objectif de préparer un éventuel attentat.
L’Allemagne et ses partenaires européens espèrent pouvoir sauver l’accord nucléaire avec l’Iran. Après tout, l’accord a été conclu à l’époque de Barack Obama quand Biden était son vice-président. Les négociations déjà difficiles ne seraient pas faites avec facilité si un jugement clair du Tribunal belge était annoncé.
Le diplomate a été arrêté dans la station-service de l’autoroute « Spessart ».
Pour Assadollah A., sa carrière de troisième conseiller s’est terminée très rapidement à la station-service de l’autoroute entre Würzburg et Aschaffenburg. L’Iranien était sur le chemin du retour du Luxembourg à Vienne lorsque la police bavaroise l’a arrêté là-bas. Quant au jeune couple, il avait récemment été arrêté en Belgique, le 1er juillet 2018.
Les responsables bavarois, qui ont été prévenus par un mandat de recherche dans toute l’Europe, ont ouvert le coffre d’une voiture qui contenait des téléphones portables, des cartes SIM, des factures d’hôtel et des bons de carburant. A cela s’ajoute un carnet rouge avec des instructions manuscrites pour les bombardiers. Assadollah A. a protesté en sa qualité de diplomate qui bénéficie de l’immunité. Une chose qui n’a pas plu aux responsables bavarois qui lui ont indiqué qu’il pourrait être accrédité en tant que diplomate en Autriche mais pas ici.