Au début de cette semaine, le Parlement tunisien a été la scène d’un incident d’échange de violence entre certains députés. En effet, l’un de ces députés a été blessé et sa collègue a perdu conscience tandis que la présidence du Parlement a promis d’ouvrir une enquête.
Ben Chahed a confirmé dans une déclaration qu’il a été victime d’agression avec des bouteilles par les députés d’Al-Karama, Seifeddine Makhlouf, Mohamed Affes et Zied Hechmi, tout en qualifiant cet incident d’opération terroriste. Il a de même considéré que l’extrémisme se situe aujourd’hui au sein même du Parlement.
Bien que le président du Parlement Rached Ghannouchi ait condamné ce qu’il a appelé d’accrochages en annonçant l’ouverture d’une enquête pour l’agression du député, Anouar Ben Chahed, mais ce qui s’est passé ouvre la porte pour débattre autour de tout ce qui a été fait par la Coalition d’Al-Karama. Ce bloc parlementaire qui regroupe un ensemble de takfiris et des hors-la-loi qui ne laissent aucune occasion pour transgresser la Constitution et la loi et exercer leurs fantasmes politiques et leur compréhension perverse du travail politique et de la défense des droits. Le fait que le président du Parlement, Rached Ghannouchi, n’a pas pris de mesures ou de décisions permettant d’arrêter ces tensions suscite l’étonnement de plusieurs observateurs qui ont même considéré que les takfiris et les provocateurs sont protégés par la présidence du Parlement. Parce que cette dernière n’a pas bougé d’un iota et se contentait à chaque fois d’un simple communiqué de dénonciation.
Cela a encore suscité les inquiétudes des Tunisiens à cause d’un possible retour à la case de polarisation de la violence vécue pendant le règne du mouvement Ennahdha en 2013 ainsi que les assassinats et le chaos qui l’ont accompagnées après que le Parlement tunisien était transformé en une plateforme d’incitation et du blanchiment du terrorisme. Ce qui nous interpelle vraiment à ne pas sous-estimer leurs répercussions.
Prôner le discours takfiriste
Un ensemble d’organisations, d’associations et de personnalités tunisiennes a adressé une pétition au Président de la République, Kaïs Saïed, et au président du Parlement, Rached Ghannouchi, appelant à interdire de glorifier le terrorisme, à un moment où les divergences politiques ont pris une tournure dangereuse d’incitation, ce qui rappelle le scénario d’assassinats politiques enregistrés en Tunisie à l’époque de la gouvernance du mouvement Ennahdha.
La pétition contenait une demande adressée au procureur pour qu’il applique fermement la loi contre ceux, qui prônent le discours d’apostasie en soutenant le terrorisme, sans prendre en considération leur statut politique ou professionnel. Les signataires de la pétition ont indiqué aussi que le Parlement est devenu un foyer pour les prôneurs du takfir, les défenseurs du terrorisme et des membres de l’Etat islamique.
Selon un certain nombre d’observateurs de l’affaire politique, la Coalition d’Al-Karma mène une guerre par procuration pour le mouvement Ennahda à travers son discours d’incitation au Parlement contre leurs adversaires politiques.
Parmi les sujets qui suscitent vraiment l’étonnement et soutiennent que la Coalition d’Al-Karama blanchit le terrorisme et les terroristes, c’est quand son président, Saifeddine Makhlouf, a critiqué l’Université de Kairouan pour avoir refusé l’inscription de l’ancien porte-parole officiel de l’organisation interdite Ansar Al-Charia, Saifeddine Al-Raïs, pour le diplôme de doctorat.
Makhlouf avait estimé que cette décision était discriminatoire qui privait un citoyen tunisien de son droit de poursuivre ses études, en contradiction avec les dispositions de la Constitution de 2014.
Ce qui est encore étonnant, c’est que Makhlouf a oublié ou peut-être ne s’oppose pas à Seifeddine Al-Raïs et Ansar Al-Charia qui, selon la justice, étaient derrière la plupart des terroristes qui ont commis des crimes odieux contre les Tunisiens dont des agents de sécurité et de l’armée, des politiciens et autres. Cette organisation a été interdite de toutes activités par la justice.
Outre le fait de défendre les terroristes par Makhlouf et de les blanchir, le représentant du même parti, Mohammad Affes, a indiqué dans un discours à l’Assemblée des représentants du peuple que : «nous ne devrions pas avoir honte du takfir car il s’agit d’un jugement de la Charia»
Par ailleurs, leur collègue de la Coalition d’Al-Karama, Nidhal Saoudi, a déclaré: « Nous nous sommes habitués à ces paroles des ennemis de l’Islam », des propos considérés comme une sorte de takfir et de l’incitation contre ceux qui critiquent leur idéologie extrémiste.
Tanière secrète du terrorisme
Certains députés parlementaires, qui sont idéologiquement en désaccord avec la Coalition d’Al-Karama et Ennahda, tiennent le gouvernement et ses institutions responsables de leur sécurité physique, puisqu’ils sont désormais réellement menacés dans leur vie à cause de l’incitation à leur encontre et de les accuser d’apostasie.
Ce qui se passe aujourd’hui suggère voire prouve que nous sommes de nouveau revenus à l’époque de takfir. Cette époque, que certains croyaient que la Tunisie avait dépassé après avoir payé un lourd tribut, avec l’assassinat de plusieurs de ses meilleurs fils, victimes de son injustice aveugle qui ne fait pas la différence entre une position intellectuelle ouverte sur la vie contemporaine et une position antireligieuse.
Les takfiris n’ont pas les attributs nécessaires qui les qualifient pour comprendre le phénomène des divergences intellectuelles, c’est pourquoi ils voient dans tout ce que l’esprit humain produit d’idées d’apostasie.
Cela met les déclarations des deux députés dans une position par laquelle le parlement tunisien serait une tanière secrète abritant des terroristes qui complotent pour se venger de la société. Ce qui se passe aujourd’hui est un appel explicite à recourir à la violence et une incitation à l’application de la charia
Les organisations religieuses extrémistes ont adopté cet appel dans le passé et ont accepté le terrorisme en tant que solution à leur crise. Mais cette fois cet appel vide du sens politique enfreint la loi sous la protection du pouvoir législatif. Une donne qui constitue une menace réelle pour la sécurité de l’État et la paix civile. Hélas, cette fois, les takfiris bénéficient de l’immunité parlementaire, ce qui leur évite les poursuites judiciaires.
Ghannouchi, silence radio
Le plus étonnant encore, c’est le silence radio terrible adopté par le président du Parlement Rached Ghannouchi par rapport aux appels explicites au rakfir, ce qui signifie un appel à la violence. Cela suppose qu’il pourrait avoir la même position et la même approche que la Coalition.
L’homme qui dirige le mouvement d’Ennahdha n’était pas connu pour ses positions condamnant les assassinats en Tunisie de politiciens que les takfiris avaient précédemment poursuivis, et il ne s’est pas opposé à l’époque du règne d’Ennahdha à l’époque de la Troïka contre les invasions des théâtres et des galeries d’art en les considérant des pratiques de mécréants.
Ghannouchi, qui est le président du Parlement, garde le silence par rapport aux appels de takfir parce qu’il approuve ces pratiques. Sinon son statut lui permet d’intervenir, d’objecter et d’empêcher les députés de scander des slogans de takfir qu’il sait bien qu’ils altèrent la sécurité du pays et violent la loi.
Aujourd’hui, le mouvement veut mesurer les réactions à travers des députés qui ne lui sont pas affiliés, mais qui les protège sous l’immunité parlementaire.
Il s’agit d’une grave violation de la loi tunisienne, qui criminalise la violence sous toutes ses formes. Le takfir n’est donc pas un point de vue politique et n’exprime pas la différence. Il s’agit plutôt d’un appel explicite à tuer. Si l’autorité législative gardait le silence face à la promotion du takfir au sein du Parlement, ceci constitue un appel explicite aux organisations terroristes pour qu’elles reprennent leurs conquêtes sans craindre d’être sanctionnées.
Il convient de rappeler que le chapitre six de la Constitution tunisienne criminalise le takfir et l’incitation à la violence et stipule que : «L’État est gardien de la religion. Il garantit la liberté de croyance, de conscience et le libre exercice des cultes ; il est le garant de la neutralité des mosquées et lieux de culte par rapport à toute instrumentalisation partisane. L’Etat s’engage à diffuser les valeurs de modération et de tolérance, à protéger les sacrés et à interdire d’y porter atteinte, comme il s’engage à interdire les campagnes d’accusation d’apostasie et l’incitation à la haine et à la violence. Il s’engage également à s’y opposer».