A partir de 2014, le nom de la Turquie a commencé à être cité d’une manière forte sur la route du trafic d’êtres humains vers l’Europe, particulièrement suite à l’aggravation de la crise syrienne et l’explosion du nombre de réfugiés. Dès lors, plusieurs informations, données et indicateurs prouvent officiellement son implication dans les opérations de traite d’êtres humains, soit en fermant les yeux sur ces opérations de trafic, soit en s’y impliquant directement, selon les déclarations d’une source officielle turque à l’Observatoire MENA.
Il est à noter que le président turc, «Recep Tayyip Erdogan», a menacé à maintes reprises les pays de l’Union européenne d’ouvrir les frontières aux immigrants, à cause des différends politiques et économiques entre l’UE et Ankara.
Des immigrants sous couvert d’étudiants … et traite par décision officielle
L’implication du gouvernement turc ou de personnes influentes parmi ses membres dans les opérations de trafic, ne s’est pas limitée, selon la source, à faciliter les opérations de trafic à travers les frontières turques, mais elle s’est également étendue pour faciliter leur sortie de leur pays et l’entrée sur le territoire turc, en utilisant de faux visas d’études permettant à plusieurs immigrés d’y entrer, puis de se diriger vers les côtes dans un voyage pour s’enfuir vers l’Europe.
La source explique que ces faux visas se vendent contre des commissions à travers des facilitateurs qui jouent le rôle d’intermédiaires entre les immigrants et les services compétents turcs. Elle a souligné aussi que ces visas sont devenus une source illégale de profits pour de nombreux fonctionnaires de l’État turc, notamment les fonctionnaires du corps diplomatique dans les pays éloignés de la Turquie et qui ne partagent pas de frontières avec la Turquie à l’instar des Somaliens, des Soudanais et certains pays d’Asie centrale.
Il est à rappeler que le gouvernement turc a annoncé en février dernier qu’il avait ouvert les frontières aux immigrants souhaitant rejoindre les îles grecques. Cela a conduit à une arrivée massive de milliers d’entre eux en dépassant les frontières maritimes vers la Grèce, leur première escale européenne.
La Turquie et le marché noir d’humains
En parlant de l’implication des parties de l’État turc dans le dossier de l’immigration et de la traite d’êtres humains, la source a dit que la Turquie est devenue un marché noir d’êtres humains, étant donné que la question de l’immigration et du trafic est liée à des réseaux intégrés composés des chefs de la mafia et de certaines personnes influentes dans l’État. Elle a indiqué que derrière les facilitateurs du trafic il y a la mafia et les puissants gangs qui mènent leurs opérations sous la couverture de certains appareils de l’Etat, notamment les garde-côtes et la gendarmerie déployés près des côtes turques.
La source considère que la multiplication des opérations de trafic vers l’Europe a fait de la Turquie le centre mondial de la traite d’êtres humains, en confirmant qu’il y a un soutien tacite de l’État turc au niveau des ses hauts responsables au trafic d’êtres humains et d’assurer ses opérations.
De l’intérieur… des réseaux constitués de la mafia et de l’État
Commentant la déclaration de la source, «Abu Ahmed», un ancien facilitateur du trafic, a affirmé que l’histoire du trafic en Turquie est comme une pyramide, dont le plus petit échelon est le facilitateur mais le plus grand ce sont les chefs de la mafia et des responsables politiques et sécuritaires, en ajoutant que les opérations de trafic dans sa forme générale sont organisées par certains appareils de l’État.
Abu Ahmed a encore déclaré que les opérations du trafic sont menées par plusieurs mafias turques et non pas une seule. Mais certaines de ces mafias se vendent entre elles des immigrants, et partagent les points de passage sur les côtes, tout en expliquant qu’ : «Elles établissent des arrangements même concernant les prix des opérations du trafic. Tout cela se déroule dans une organisation totale contrairement à ce que les gens pensent. Mais si des violations avaient lieu, de grands affrontements armés éclatent entre les mafias ».
Abu Ahmed a révélé par la suite que le processus est régi par une hiérarchie pyramidale selon laquelle l’argent provenant du trafic est réparti sur les différents acteurs. Il a précisé que chaque personne dans cette hiérarchie ne connaît que son responsable direct.
En outre, Abu Ahmed a confirmé que le timing des opérations de trafic se fixait en coordination avec les appareils de l’État turc, y compris la gendarmerie et les garde-côtes. Il a ajouté que : « nous étions toujours au courant des moments à partir desquels nous devrions partir et les moments où les côtes sont bien gardées ou non. En conclusion, je dirais que nous travaillions sous les yeux de l’État ou du moins de certains de ses hauts responsables ».
Il est à noter que les autorités grecques avaient appelé leurs homologues turques à déployer plus d’efforts pour empêcher les immigrants d’entrer illégalement sur son territoire, en indiquant que l’entrée dernièrement d’immigrés provenant particulièrement de la Somalie, semble être préalablement organisée.
Entre le politique et l’économique … un ensemble de profits
Les intérêts de la partie turque des opérations de trafic des réfugiés vers l’Europe ont été répartis par le chercheur stratégique, Omar Kamal, sur deux niveaux politique et financier. Il a souligné que : «Le problème n’est pas seulement lié aux avantages financiers tirés par les passeurs ou les personnes corrompues de l’Etat, mais plutôt leurs profits touchent la partie politique, étant donné que le gouvernement turc les utilise en tant que carte de pression sur l’Union européenne dans les nombreux dossiers objet de différends entre les deux parties.
Dans ses analyses, « Kamal » considère que la Turquie comme pays stable en termes de sécurité, et ne souffre pas de troubles à l’instar de la Libye. En effet, la plupart des opérations de trafic ne peut avoir lieu qu’avec la bénédiction de l’Etat ou en fermant les yeux sur les trafiquants et de leurs activités. Il a estimé de même que le gouvernement turc est l’une des parties bénéficiant de ces opérations du trafic.
Par ailleurs, « Kamal » a souligné que quand le gouvernement turc a signé l’accord avec l’Union européenne en 2016, il a prouvé qu’il était impliqué dans les opérations de trafic d’êtres humains vers l’Europe, notamment qu’il était après en mesure de contrôler ses frontières et d’empêcher tous les bateaux de réfugiés de traverser la mer, avant de retourner à ses pratiques après les tensions enregistrées entre Ankara et l’Union européenne à cause des affaires de gaz, de l’intervention turque en Syrie et en Libye et les questions liées au terrorisme.
Il est à noter que les statistiques officielles grecques ont révélé qu’il y avait entre 2000 et 3000 immigrants sur la côte ouest de la Turquie, qui attendaient leur départ vers la Grèce, dont 214 immigrants ont déjà débarqué jusqu’à présent à Lesbos, parmi eux 142 Somaliens.