Le défilé militaire organisé par l’armée libyenne dans la base de « Benina à Benghazi » a dessiné le visage du conflit en Libye, puisqu’il a coïncidé avec la visite du président du Conseil de la présidence, « Mohammad el-Menfi » en Tunisie, tandis que le chef du gouvernement, Abdel Hamid Dabeibah, s’est rendu en Algérie, et le président du Parlement, Aguila Salah, a présenté ses excuses de ne pas y assister en s’excusant de sa rencontre avec l’envoyé de l’ONU, Jan Kubis.
Le Conseil présidentiel libyen, en sa qualité de commandant en chef de l’armée, a mis en garde avant le défilé militaire, dans un communiqué, contre « des actions unilatérales qui pourraient être exploitées par d’autres parties et qui pourraient conduire à un nouveau conflit ».
Actions unilatérales
Le commandant en chef de l’armée nationale libyenne, le maréchal Khalifa Haftar, avait invité Mohammad el-Menfi, chef du Conseil présidentiel, et Abdel Hamid al-Dabeibah, chef du gouvernement d’entente nationale et le président du Parlement libyen, le conseiller, Aguila Saleh, pour assister au défilé militaire qui a eu lieu samedi à l’occasion de la célébration du septième anniversaire de la Révolution de la dignité.
De son côté, le vice-président du Conseil présidentiel pour la région de Tripoli, Abdallah Lefi, a indiqué dans un communiqué séparé publié depuis Ankara que «le conseil a insisté à plusieurs reprises qu’il fallait éviter toute action unilatérale de nature militaire de la part de toute partie, y compris les manœuvres, les mouvements sur le terrain, les déclarations à la presse des militaires, les parades militaires qui pourraient conduire à nouveau au déclenchement de la guerre ». Il a expliqué que «l’action unilatérale toute partie justifiera des réactions similaires de la part des autres parties, et cela pourrait mener à entraver le processus politique et à menacer la sécurité et la paix nationale ».
En outre, les médias ont rapporté: «Un message via WhatsApp a été reçu par les ministres qui représentent la région de l’Est et les proches de l’armée les invitant à ne pas assister au spectacle pour éviter toute réaction imprévisible des milices de la région de l’ouest qui menaçaient les autorités de la capitale, Tripoli, qu’ils puniraient tous ceux qui soutiennent l’armée en assistant au défilé à Benghazi.
Le commandant en chef de l’armée nationale, le maréchal Khalifa Haftar, a déclaré lors du défilé militaire que «le monde s’est précipité pour trouver une solution pacifique en Libye après que les forces armées étaient sur le point de libérer la capitale, Tripoli,» en appelant à « dissoudre les groupes armés à Tripoli et s’orienter vers des élections populaires directes sans tergiversations».
«Haftar» a estimé que «tous les congrès internationaux qui se sont tenues pour emprunter la voie pacifique, en tête le congrès de Berlin, n’étaient rien d’autre que le résultat de la bonne décision de diriger nos forces vers Tripoli», notant qu’« elles n’hésiteront pas à combattre à nouveau pour imposer la paix par la force, si elle est entravée par le compromis de paix convenu. « Vous avez été avertis ».
Le porte-parole du commandement général de l’armée, le général de division «Ahmed Al-Mesmari», a répondu aux critiques du défilé, en affirmant que « l’objectif n’est pas menacer qui que ce soit, mais plutôt un défilé de paix et de loyauté envers les martyrs et les blessés et tous ceux qui ont apporté leur soutien au projet de guerre contre le terrorisme et le crime ».
Il a également souligné que «les Libyens et le commandement général sont dans une guerre inachevée et continue contre le terrorisme et la criminalité, et il s’agit d’une guerre internationale contre le terrorisme dans plusieurs pays, pas seulement en Libye», expliquant que «l’armée poursuit toujours les cellules dormantes et il possède des rapports de la sécurité intérieure, des renseignements militaires et bien d’autres appareils concernés et que l’ensemble du territoire libyen sous le contrôle des forces armées ».
Guerre froide
Le communiqué du Conseil présidentiel relatif à la parade militaire organisée par l’armée libyenne a révélé la profondeur du désaccord et du conflit qui domine encore la scène politique dans un indicateur dangereux qui peut reproduire le scénario du gouvernement «el-Sarraj» à nouveau, et peut-être se transformer en une « guerre froide » confirmée par la nature des récents mouvements avant l’organisation du congrès de Berlin 2.
Les observateurs ont souligné que le communiqué ne portait pas les signatures des trois présidents, ce qui indique l’existence de réels différends entre les membres du Conseil de la présidence. Ils ont expliqué que « cela pourrait affecter la tenue des élections à la date spécifiée à la fin de cette année, selon la décision souveraine rendue par la Chambre des représentants en 2014, qui stipule que les élections se tiendront directement par le biais du scrutin général du peuple ».
«Abdelkader Hwili», membre du Conseil du Forum pour le dialogue politique, a déclaré que «le communiqué exprime un désaccord entre les membres du Conseil présidentiel, et l’échec de l’unification de l’institution militaire et de se ranger sous ordres du commandement suprême de l’armée, qui est le Conseil de la présidence, et cela va avoir des répercussions sur la tenue des élections au rendez-vous prévu », en ajoutant que« tout ce qui se passe à l’est de la Libye n’est pas de bon augure ».
Sur un autre plan, «Ramzi Al-Romih», conseiller de l’Organisation libyenne pour les études sur la sécurité nationale, a estimé que «le communiqué est illégal et inconstitutionnel et ouvre la voie à l’usurpation d’identité d’un poste dont la Libye a souffert depuis 7 ans, celui lié au poste de chef suprême en affirmant que ce poste appartient au Conseil présidentiel réuni, et aucun de ses membres n’a le droit de parler en qualité de commandant suprême de l’armée libyenne ».
Al-Romih a souligné que «le maréchal Khalifa Haftar est le commandant général de l’armée libyenne, selon la décision rendue par la Chambre des représentants, la loi n° 12, et le général Al-Nadhouri, a été désigné état-major par le Parlement qui a donné sa confiance au gouvernement actuel.
Il est à noter que le Forum de dialogue politique libyen s’est tenu les 26 et 27 mai afin de discuter de la base constitutionnelle des élections, mais il n’a pas atteint un consensus à ce sujet en raison des désaccords qui se sont produits en son sein, certains sur le référendum par rapport au projet de la Constitution d’abord, en plus de propositions telles que le choix du président par le Parlement et a interdit la candidature du personnel de sécurité et de l’armée, ce qui a été opposé par de nombreux membres du forum.
Mouvements stratosphériques
Alors que les observateurs s’attendent à ce que la date prévue pour les élections présidentielles et parlementaires soit retardée en raison du climat politique actuel, les efforts internationaux se poursuivent pour préparer le Congrès de Berlin 2, qui se tiendra le 23 juin prochain, avec la participation de nombreux pays dans un processus global visant à obtenir les avantages politiques, sécuritaires et économiques de tous les Libyens et de leurs partenaires.
Le chef du gouvernement libyen, Abdelhamid al-Dabeibah, se rend aujourd’hui à Paris lundi pour une visite de travail officielle de deux jours pour discuter de nombreux dossiers entre les deux pays. Dabeibah évoque la coopération militaire, sécuritaire et économique, accompagné de sept ministres de son gouvernement, y compris les ministres des Affaires étrangères, de la Défense, de l’Economie, des Transports, du Pétrole et de la Santé.
Par ailleurs, « Dabeibah, lors de sa visite en Algérie hier, dimanche, a demandé au président algérien « Abdelmajid Tebboune » de participer à la réconciliation nationale, étant donné que l’Algérie ne s’est pas ingérée dans les problèmes de la Libye au cours des dix dernières années.
La délégation libyenne a discuté avec les autorités algériennes de l’élévation du niveau de coopération entre les deux pays, que Dabeibah a qualifié de faible, tandis que l’Algérie a promis de surmonter les obstacles restants pour la porter à environ trois milliards de dollars par an.
De plus, l’ambassadeur américain en Libye, Richard Norland, s’est entretenu avec le chef du Conseil de la présidence libyenne, Mohammad el-Menfi, qui a traité de l’unification des institutions militaires, de sécurité et autres, selon le communiqué de l’ambassade américaine.
Le communiqué a souligné que «les pourparlers qui ont eu lieu en Tunisie coïncidant avec la visite d’el-Menfi, ont également évoqué le dossier de la réconciliation libyenne et de l’expulsion des combattants étrangers de Libye et les élections prévues en décembre prochain, outre l’amélioration des conditions de sécurité au sud de la Libye pour mieux faire face à des problèmes tels que la traite des êtres humains et la présence de mercenaires ».
De son côté, le Conseil présidentiel libyen a annoncé hier, dimanche, le lancement de forums de réconciliation nationale, qui commencent aujourd’hui, lundi, et durent un mois, au cours desquels les citoyens présentent leurs points de vue sur la structure de la Commission de réconciliation et l’achèvement du processus de la réconciliation car les Libyens de toutes les sectes et composantes sociales doivent se réunir.
Il convient de noter que, le 6 avril, le Conseil de la présidence a annoncé la création d’un Haut-commissariat pour la réconciliation nationale chargé de résoudre les différends entre Libyens, qui comprend des experts juridique, des experts de la réconciliation et des universitaires de toutes les régions de la Libye.