Le dossier de la reconstruction de Gaza fait face à d’épineuses difficultés, après que les États-Unis et Israël ont mis des conditions imposant que l’Autorité palestinienne devrait prendre en charge la direction de la reconstruction. Néanmoins, cette condition a bloqué la possibilité d’entamer la reconstruction de ce que l’occupation avait détruit notamment après le refus du Hamas d’impliquer l’Autorité palestinienne dans le processus de la reconstruction de Gaza, ainsi que le fait de lier par l’occupation israélienne le processus de la reconstruction à la question des prisonniers détenus par le Hamas. Par ailleurs, Israël continue de fermer les points de passage commerciaux de la Bande de Gaza et d’empêcher l’entrée des matériaux de construction en général.
Israël, rappelle-t-on, a mené une attaque sur la Bande de Gaza le 10 mai, qualifiée de la plus violente, après le bombardement de Jérusalem par les Brigades al-Qassam en réponse aux tentatives de forcer les habitants de quitter le quartier de Sheikh Jarrah. Lors de cette attaque, Israël a détruit des milliers de maisons et d’installations industrielles et commerciales, outre la destruction de l’infrastructure dans la Bande de Gaza, causant ainsi d’énormes pertes humaines et matérielles. Le coût de la reconstruction, selon des parties gouvernementales à Gaza, est estimé à 8 milliards de dollars.
Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a annoncé que l’Egypte fournirait une aide financière de 500 millions de dollars pour aider à la reconstruction de Gaza en partenariat avec des entreprises égyptiennes, tandis que le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Choukri a insisté que l’aide à Gaza et pour la reconstruction seraient entièrement réalisées en coordination avec l’Autorité palestinienne. Or, le Hamas rejette toute proposition régionale et internationale basée sur la participation de l’Autorité palestinienne dans le processus de la reconstruction, et à cause de la tentative d’Israël et des États-Unis de mettre des obstacles, l’Union européenne a demandé la reconstruction de Gaza sans des conditions préalables internationales, appelant toutes les forces palestiniennes à accepter de former un gouvernement d’union nationale qui entreprendrait la reconstruction avec des pas sérieux et importants. Les responsables des Nations Unies ont appelé de leur côté à entamer une vraie opération politique visant la reconstruction à long terme de la Bande de Gaza, tout en s’empêchant d’imposer des conditions qui aggravent la situation dans la région.
L’Autorité palestinienne travaille, avec le soutien américain et européen et les Nations Unies, à l’élaboration d’un programme de reconstruction de la Bande de Gaza, qui est contrôlée par le Hamas, et elle refuse que le Hamas s’accapare ce processus, tandis que Washington et Tel-Aviv œuvrent pour écarter le mouvement, par inquiétude que le Hamas exploite les fonds et les matériaux de reconstruction pour développer ses capacités militaires, mais l’insistance du Hamas d’empêcher la participation de l’Autorité palestinienne bloque l’arrivée des fonds des donateurs.
Au lendemain du cessez-le-feu entre le Hamas et Israël le 20 mai, le président américain Joe Biden a indiqué que Washington apporterait le soutien nécessaire pour la reconstruction de Gaza, mais le processus de reconstruction serait loin de toute direction ou contrôle du Hamas, afin de s’assurer que ce dernier n’exploite pas les fonds et les matériaux de reconstruction pour renforcer ses capacités militaires, et que le processus de la reconstruction se fera uniquement en partenariat avec l’Autorité palestinienne.
L’Egypte avait informé les factions palestiniennes jeudi 10 juin que la date des pourparlers et des réunions qui devaient avoir lieu au Caire la semaine dernière avait été reportée. Par rapport aux raisons de ce retard, des sources ont indiqué que la difficulté de s’entendre sur certaines questions entre le Hamas et le Fatah, a poussé le Caire à donner plus de temps aux factions, à se consulter et à s’entendre sur les différends liés aux dossiers fondamentaux.
Dans ce contexte, le professeur des sciences politiques, Atieh Jawabra, a affirmé que l’Autorité palestinienne, en tant que représentant légitime du peuple palestinien, a le droit de s’occuper des efforts de reconstruction de la Bande de Gaza, parce qu’elle est la partie internationalement reconnue, tandis que le Hamas, après avoir été internationalement classé comme organisation terroriste, ne peut obtenir des fonds de la part de nombreux pays donateurs, ce qui entravera la reconstruction de Gaza.
Jawabra a indiqué à « l’Observatoire MENA » : que depuis son entrée en guerre, le Hamas cherche à contourner l’Autorité palestinienne et l’Organisation de libération, car de nombreux pays ayant un poids politique et financier politique soutiennent les positions du Hamas, notamment la Turquie et le Qatar. Pour cela le Hamas cherche à prendre la place de l’Autorité et refuse sa participation dans toute question en suspens à Gaza, surtout après l’échec des élections, que le président Abbas annonçait son annulation début mai.
Il a expliqué que l’Égypte a du mal à surmonter les différends profonds entre le Hamas et le Fatah, puisque les réunions préliminaires qui ont eu lieu séparément entre les délégations du Hamas et du Fatah avec des responsables égyptiens ne sont pas parvenues à un consensus. Par conséquent, les responsables égyptiens ont eu du mal à trouver un accord formel qui pourrait être signé entre les chefs des factions, et cela est de nature d’aggraver la situation de la Bande Gaza détruite, et freine la possibilité d’entamer la reconstruction de Gaza de sitôt.
Jawabra suppose qu’en l’absence de solutions concrètes et proches aux questions en suspens pour commencer la reconstruction de Gaza, l’Égypte dirigerait le processus de reconstruction sous la pression d’Israël et des Etats Unis. Et cela sera salué par le Hamas pour l’intervention de l’Égypte, avec laquelle il maintient des relations solides, tandis qu’Israël ne refuserait que l’Egypte prendra en charge la direction du processus de la reconstruction, étant donné que l’Egypte est un pays influent régionalement et ayant son poids.
Bien qu’Israël et les Etats Unis insistent pour attribuer à l’Autorité le droit de contrôler le processus de reconstruction, les citoyens propriétaires des maisons et des structures détruites à Gaza craignent la reproduction du scénario de la guerre de 2014, où l’Autorité palestinienne a conclu ses contrats en tant que partie responsable de la direction de la reconstruction, tandis que des centaines de familles demeurent encore sans abri. De plus, il y a de nombreuses tours résidentielles et structures industrielles qui sont bloquées et n’ont pas été reconstruites, au milieu des accusations de détournement par l’Autorité des fonds fournis par les pays donateurs.
De son côté, l’écrivain et politologue Khalil Shaheen a indiqué que l’Autorité palestinienne s’en tient au dossier de la reconstruction de Gaza, non seulement du point de vue de l’intérêt politique en voulant rester une partie importante dans l’équation, mais aussi parce qu’il y a un intérêt économique à travers lequel l’Autorité essaie d’obtenir des rendements économiques, à travers le flux des fonds de reconstruction vers sa trésorerie. D’ailleurs, elle reçoit une partie des taxes exorbitantes sur les marchandises entrant dans la Bande de Gaza, via les points de passage israéliens, ce qui renforce la trésorerie de l’Autorité financière.
Dans sa déclaration à l’Observatoire MENA, Shaheen a ajouté que la reconstruction et la fin du blocus sur Gaza et la possibilité de résoudre tous les problèmes en suspens dans la Bande, doivent avoir lieu en mettant en œuvre l’unité du peuple palestinien sous la houlette de l’Organisation de libération de la Palestine, et la participation du Fatah et du Hamas dans un gouvernement d’union nationale, pour surmonter tous les obstacles, qu’Israël et des parties extérieures mettent devant le processus de la reconstruction et devant d’autres questions.
Il a poursuivi que les citoyens de la Bande de Gaza ont des priorités dans cette étape, c’est la reconstruction de ce qui a été détruit par Israël pendant la guerre contre Gaza, ainsi que les besoins de la Bande de Gaza ne consiste pas seulement à reconstruire ce qui a été détruit lors de la guerre, mais plutôt « d’investir la victoire remportée par notre peuple pour mettre fin au blocus, et d’assurer le flux des fonds, soit par l’Egypte ou les Nations Unies, afin de faire employer le plus grand nombre possible de travailleurs, spécifiquement dans le secteur de la construction, mettre fin à la crise de l’électricité et des eaux usées, développer les infrastructures et améliorer les conditions de vie de milliers de citoyens sans emploi ».
Selon des données officielles publiées par les services palestiniens de la statistique, le taux de chômage à Gaza a atteint 52 % depuis le début de cette année, tandis que le chef du Comité populaire pour faire face au blocus, Jamal Khoudary, a expliqué que l’augmentation du taux de chômage parmi les jeunes à Gaza aura des répercussions négatives sur la situation à l’intérieur de la Bande de Gaza, en particulier avec la hausse du taux de ceux qui vivent en dessous du seuil de la pauvreté et la dépendance d’un grand nombre de familles de l’aide octroyée par l’UNRWA et d’autres organisations humanitaires.