La polémique s’intensifie autour du rôle joué par l’Iran en Afghanistan, influencée par les déclarations de l’ancien président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qui ont révélé le soutien de l’Iran au mouvement extrémiste (Les talibans), outre l’accélération de son contrôle de plusieurs provinces afghanes. Cela a créé des appréhensions en ce qui concerne une éventuelle nouvelle domination sur le pays, 20 ans après la chute de son règne.
Il est à rappeler que les autorités afghanes ont annoncé la semaine dernière que les combattants du mouvement avaient pris le contrôle de grandes parties des zones frontalières avec le Tadjikistan et l’Iran, en parallèle avec les opérations du retrait des forces américaines et des forces de la coalition internationale de leurs bases en Afghanistan, qui devraient s’achever le 11 septembre prochain.
Une politique diabolique et un rôle négatif
Les déclarations d’Ahmadinejad, considérées comme les premières du genre, puisqu’elles sont annoncées par un responsable de sa stature, ont rappelé la question du rapport de l’Iran avec les mouvements extrémistes, soit Taliban ou d’Al-Qaïda, qui était provoqué après le meurtre du fils de l’ancien chef d’Al-Qaïda, «Hamza ben Laden» lors d’un raid américain qui l’avait ciblé en Iran. A cela s’ajoute ce qui a été révélé par un ancien officier du bureau du premier ministre irakien, «Nouri al-Maliki», sur le rôle de ce dernier et de l’ancien commandant de la Force Al-Qods, «Qassem Soleimani» à propos du contrôle de l’Etat islamique du Mossoul en 2014, outre les rapports sur l’existence des camps appartenant au Taliban et à Al-Qaïda en Iran, mis en place après la guerre américaine contre le mouvement en 2001.
Dans cette lignée, le politologue, Houssam Youssef, a indiqué : « Malgré le différend annoncé entre l’Iran, Taliban et Al-Qaïda, mais toutes les parties précédentes sont liés par plusieurs choses, dont le plus importante est l’idéologie commune, la façon de penser, et le projet basé sur une base religieuse. De plus, il s’agit de leurs conflits avec les États-Unis. Tout cela rend l’alliance entre ces parties possible et non exclue, en ajoutant que le contrôle une nouvelle fois par les talibans de l’Afghanistan, avec le soutien de l’Iran, ouvrirait une nouvelle scène de confrontation entre Téhéran et Washington.
Youssef a poursuivi par ailleurs que les dirigeants iraniens mènent une politique de guerre par procuration contre Washington, étant donné que ses circonstances internes et sa force militaire ne lui permettent pas un affrontement direct, en soulignant que le retour de l’ancien ennemi des États-Unis sur le devant de la scène en Afghanistan préoccupera l’administration Biden et allégera la pression américaine sur l’Iran.
Dans le même contexte, Youssef a insisté sur la nécessité de comprendre la nature de la pensée iranienne, loin des stéréotypes dans les médias en le présentant en tant que puissance chiite, en indiquant que le régime iranien est en fait une force fondée sur l’adaptation des liens religieux et l’extrémisme religieux pour servir des objectifs politiques, même si ces liens avec des parties non chiites.
Ahmadinejad avait décrit la politique iranienne comme étant diabolique attisant la tension en Afghanistan en soutenant les talibans et en leur demandant d’arrêter cette politique et de laisser les peuples le droit de l’autodétermination.
Les bénéfices d’opium et le trafic de drogue
Les bénéfices de l’Iran en soutenant le contrôle de l’Afghanistan dépassent les limites des avantages politiques pour atteindre des avantages économiques et financiers, surtout au milieu du blocus économique en cours, selon l’affirmation de l’analyste économique «Radwan Kafrjouma», en ajoutant que l’économie iranienne dans les circonstances actuelles peut être décrite comme étant une «économie souterraine». C’est-à-dire, basée sur des opérations illégales, la contrebande, le blanchiment d’argent et les accords d’économie souterraine.
Et Kafrjouma a poursuivi : « L’Afghanistan est connu pour être le centre de la culture du haschich et de l’opium dans le monde, et cela pourrait aider l’Iran à améliorer son économie en ouvrant des routes de contrebande de drogue à travers son territoire vers le Golfe arabe et le Moyen-Orient, comme c’est le cas pour le cas au Liban, et ainsi sécuriser de nouvelles recettes financières, outre l’animation de la contrebande de son pétrole vers le territoire afghan au profit des talibans», en insistant que le soutien iranien aux talibans ne sera pas gratuit et ne sera pas limité aux objectifs politiques.
Il est à indiquer que des responsables du gouvernement irakien ont révélé que la plupart des cargaisons de drogue entrant en Irak ont traversé les frontières avec l’Iran, d’autant plus que les postes frontaliers étaient sous le contrôle des milices irakiennes soutenues par l’Iran.
Par ailleurs, Kafrjouma a expliqué que le blocus américain sur le secteur pétrolier a causé des pertes financières au régime iranien qui ont dépassé 200 milliards de dollars, et non 150 milliards de dollars comme annoncé précédemment par le président iranien Hassan Rouhani, en disant que : « Ces pertes vont pousser l’Iran prendre en considération les facteurs économiques et ses bénéfices dans sa politique à l’intérieur de l’Afghanistan et dans son soutien aux talibans.
Les meilleurs scénarios et le jeu en déviation
Les facteurs du soutien de l’Iran aux talibans s’étendent également, selon l’expert stratégique, Abdullah Al-Omar, à l’idée de soutenir le régime du non-Etat. Il s’agit de l’un des jeux maitrisés par l’Iran lors de l’établissement de ses alliances, en indiquant que le régime iranien, durant ses 40 ans de règne, a prouvé qu’il n’est pas doué pour nouer des alliances avec des États mais avec des mouvements et des milices, soit au Liban, en Irak, au Yémen ou même en Syrie. Ce qui pourrait se reproduire également en Afghanistan, d’autant plus que le régime iranien considère le gouvernement afghan comme étant une partie pro-Washington.
Al-Omar fait la liaison également entre le rôle de l’Iran en Afghanistan et un certain nombre d’évolutions régionales, précisément sur les scènes syrienne et irakienne, en expliquant que l’intervention russe en Syrie et l’arrivée d’un gouvernement irakien soutenu par les États-Unis, ont suscité l’inquiétude du régime iranien concernant la possibilité d’y perdre son influence dans les années à venir.
Al-Omar a conclu en insistant sur le fait que l’Iran a besoin du soutien des talibans plus que ces derniers n’en ont besoin, surtout que le mouvement a commencé, ces dernières années, à s’impliquer davantage dans le domaine de la politique et de la diplomatie avec la communauté internationale, en considérant que l’Iran est assiégé à l’international plus que Taliban.