Union européenne
Le gouvernement allemand a besoin du soutien de Paris
Le nouveau gouvernement fédéral en Allemagne pousse vers une politique plus humaine en faveur des réfugiés, tandis que la France demande exactement le contraire.
Peu après avoir prêté serment, la nouvelle ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, a clairement indiqué qu’elle ne souhaitait pas poursuivre la politique des réfugiés de son prédécesseur, Seehofer. Elle a parlé d’un « nouvel esprit » concernant la politique d’asile.
Le gouvernement allemand veut mettre un terme aux décès en Méditerranée, renforcer l’immigration légale vers l’UE ainsi que reculer l’immigration clandestine. Une « coalition d’États membres disposés à les recevoir » doit ouvrir la voie à accueillir des réfugiés. Faeser cherche des moyens « particulièrement avec les Français » pour que d’autres Etats « suivent le bon exemple ».
Lors de la réunion informelle des ministres de la Justice et de l’Intérieur de l’UE à Lille, la discussion a cependant porté sur une approche beaucoup plus stricte de la politique d’asile.
L’Allemagne est liée étroitement à la France en termes de politique migratoire. Toutefois, sous la présidence française du Conseil de l’UE, la sécurité et la protection des frontières extérieures de l’UE pourraient passer au devant de la scène, tandis que l’humanisme passe au second plan. Macron est en pleine campagne électorale, donc en France il peut moins marquer avec des positions humanitaires qu’avec de l’intransigeance et du contrôle.
Le message : la libre circulation sans restriction dans l’espace Schengen ne peut être accordée qu’une fois que l’UE aura le contrôle de toutes les frontières. Afin de pouvoir réagir plus rapidement en cas de crise, Macron a également appelé à la mise en place d’un « Conseil Schengen », analogue à l’Eurogroupe, au sein duquel les ministres concernés se réunissent. Macron a eu l’approbation unanime pour son idée, et le Conseil doit se réunir pour la première fois le 3 mars prochain.
En marge de la réunionà Lille, les critiques ont également été claires sur les projets de la ministre allemande de l’Intérieur. « Nous avons besoin d’une protection des frontières extérieures plus stricte et plus forte », a déclaré le ministre autrichien de l’Intérieur, Gerhard Karner. Contrairement à Faeser, il a qualifié les États qui défendent cela comme une « coalition de raisonnables ».
Pour Faeser, la question, si les appels de la France pour un nouveau régime frontalier plus strict sont liés aux engagements pris par certains États de l’UE d’accepter des réfugiés, est cruciale. Selon la proposition allemande, ceux qui s’y opposent peuvent également faire preuve de solidarité en payant. La France avait jusqu’à présent refusé de verser de l’argent au lieu d’accepter des réfugiés.
Allemagne:
Un ancien responsable de Ditib condamné
L’ancien patron de Ditib de la ville allemande de Göttingen, Mustafa Keskin, a été condamné à une peine de probation en ligne pour des publications antisémites. Il devrait également payer une amende pour ses déclarations.
L’ancien responsable de l’Association germano-turque des mosquées avait publié, entre 2015 et 2021, au moins cinq messages sur les réseaux sociaux et Internet contenant des insultes contre les Juifs et les Arméniens ainsi avec des théories du complot. Cela a été annoncé par le tribunal de district de Göttingen.
Le tribunal a décidé une peine de dix mois de prison avec sursis pendant deux ans. Keskin est également tenu de verser une somme forfaitaire de 1200 euros sur tranches à hauteur de 75 euros à une association caritative.
Entre autres, Keskin avait partagé une publication montrant le pape François et l’extrémiste de droite turc Mehmet Ali Ağca. Ce dernier avait gravement blessé le pape Jean-Paul II lors d’une tentative d’assassinat en 1981. Parce que François reconnaissait le génocide des Arméniens comme une réalité historique, il ne devrait pas être surpris si quelqu’un lui tire une balle dans la tête, a indiqué le texte de l’article.
La nouvelle est sortie au public grâce aux recherches de l’association de jeunesse socialiste « Die Falken ». Keskin a ensuite démissionné en février 2021. En tant que président local du Ditib à Göttingen, il avait milité pour le dialogue interreligieux et s’était impliqué, entre autres, dans la table ronde des religions abrahamiques à Göttingen.
L’association des mosquées, Ditib, a longtemps été politiquement objet de controverse. De nombreux politiciens fédéraux et étatiques la considèrent fortement influencé par le gouvernement conservateur AKP du président Recep Tayyip Erdoğan. Les critiques appellent à la détacher du gouvernement turc et de l’autorité religieuse Diyanet à Ankara depuis 2016.
Ditib a notamment fait la une des journaux en 2016, lorsque des imams en Allemagne ont apparemment espionné leurs fidèles pour le compte du gouvernement turc.
La Suède:
L’influence de l’islam politique sur les politiques et la société
Un rapport publié par l’Office suédois de la protection civile et de la préparation aux crises (MSB) sur une éventuelle menace sur la société civile posée par les Frères musulmans a fait l’objet de vives critiques de la part des chercheurs suédois sur l’islam. Il en ressort que diverses organisations musulmanes en Suède ayant des liens avec le mouvement islamiste des Frères musulmans tentent de construire une société parallèle.
Le raisonnement est basé sur l’observation qu’en Suède le discours public sur la relation entre les musulmans et la société majoritaire est très « flou ». En particulier, il n’y a pas de démarcation conceptuelle claire entre « islamique », c’est-à-dire ce qui se réfère simplement à la pratique de la religion en tant que telle, et « islamiste », qui décrit les objectifs politiques des communautés musulmanes.
Les Frères musulmans tentent de s’implanter en Suède par le biais d’organisations avancées mais contrôlées par eux, avec un système qui ne repose pas sur les valeurs d’un ordre social libéral ou sur la séparation stricte de la religion et de l’État.
Pour leur travail politiquement motivé, les Frères musulmans exploitent habilement les faiblesses et les contradictions du concept suédois pour façonner une société multiculturelle. La tendance de l’élite intellectuelle suédoise pour le politiquement correct permet très facilement à l’islam politique, en quête de plus d’influence, de rejeter toute critique envers sa tendance non libérale comme « raciste » ou « islamophobe ». Cela crée le paradoxe qu’une direction politique, elle-même opposée à des valeurs importantes pour l’image suédoise telles que la tolérance, la liberté d’expression et la liberté de religion, exploite les valeurs de la société libre pour la saper.
Le fait que le rapport a été rejeté par les Jeunes musulmans de Suède (SUM) comme une « théorie de conspiration raciste » s’inscrit dans le schéma du discours décrit. Et le fait que le SUM a été privé de la subvention de l’État par l’Office suédois de la protection de la jeunesse en 2017 en raison d’un « manque de respect pour l’idée démocratique » en dit aussi long. L’organisation de la jeunesse des démocrates suédois nationalistes de droite a également été touchée par la même mesure.
L’Autriche:
L’Autorité de protection des données rejette la protestation d’une organisation de jeunesse musulmane
La publication de lieux et d’informations sur les associations islamiques et les mosquées sur la « carte de l’islam » du « Centre de documentation pour l’islam politique » n’a pas violé le droit au secret ou le droit à l’information de la jeunesse musulmane d’Autriche (MJÖ). Dans ce cas de figure, la liberté de la science et la liberté d’expression l’emportent sur le secret des données personnelles, selon une récente décision de l’Autorité de protection des données.
Les emplacements de plus de 600 associations islamiques et mosquées en Autriche peuvent être consultés sur la controversée « Carte de l’islam » et les utilisateurs peuvent utiliser divers critères pour rechercher ces structures. Selon la plainte du MJÖ, certaines données généralement inaccessibles, telles que les adresses privées des membres ou des officiels du club, sont également divulguées. Cependant, certains des plaignants ont un intérêt particulier au secret car, en tant qu’organisations de jeunesse musulmane, ils sont « exposés aux hostilités islamophobes » et il y a « une menace réelle sous la forme d’attaques physiques contre leurs institutions».
Lors de sa décision, l’Autorité de protection des données a maintenant déclaré que le droit fondamental à la liberté de la science et de l’opinion dans le cas de la « Carte de l’Islam » doit avoir plus de poids que le droit du MJÖ au secret de ses données personnelles. La carte apporte une contribution à un débat d’intérêt général, puisque les questions relatives à l’islam font régulièrement l’objet de couvertures médiatiques.
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