Comité de rédaction
Après plus de deux ans des élections, la Turquie connaît une dynamique et une accélération des événements au niveau interne et externe, en particulier avec l’actuel gouvernement qui est inondé par de nombreux dossiers qui peuvent conduire à une confrontation avec la communauté internationale, selon ce que voit l’analyste politique Abdullah Al-Mirghani ».
Les journaux hébreux ont publié des informations qui parlent d’un accord entre les pays européens et les États-Unis, visant à imposer des sanctions contre la Turquie, dans le but de changer la politique du président turc Recep Tayyip Erdogan sur un certain nombre de questions régionales, telles que l’intervention militaire en Libye, les opérations militaires en Syrie, le système russe S400, et les provocations de l’Union européenne, à travers l’exploitation du dossier des réfugiés et la question de la mosquée Sainte-Sophie.
Avant les élections : La Turquie à la saveur iranienne
L’analyste Al-Mirghani décrit ces sanctions, au cas où elles seraient appliquées, comme un coup douloureux pour la Turquie, d’autant plus qu’elles arrivent à un moment où l’économie turque est en mauvaise état. Toutefois, l’analyste a minimisé l’impact des sanctions sur les résultats des élections d’une manière que le parti Justice et développement ne perdra pas ses pouvoirs absolus étant donné que les sanctions ne sont pas une nouveauté pour la Turquie et que le peuple turc ne s’intéresse pas aux questions internationale et aux politiques étrangères lorsqu’il détermine son choix électoral.
En 2019 les États-Unis avaient imposé des sanctions à Ankara, ce qui affectait la structure générale de l’économie. Les données de l’Autorité turque des statistiques révélant que le taux de pauvreté dans le pays avait atteint 37,5% l’année dernière, après avoir été de 18% en 2002, avec l’arrivée au pouvoir du parti Justice et développement, comme l’indique clairement la commission.
Pour Al-Mirghani les choix des électeurs turcs seront légèrement impactés par les sanctions, mais cela ne sera pas suffisant pour écarter le gouvernement actuel, mais peut plutôt, au mieux, limiter son influence et sa capacité à diriger l’État et exclure les partis d’opposition.
L’analyste affirme que la politique des sanctions ne changera pas l’approche du gouvernement Justice et Développement, d’autant plus qu’il adopte le discours nationaliste historique cherchant à restaurer les anciennes gloires, déjà apparues à plusieurs reprises, que ce soit lors des premières prières du vendredi à la mosquée Aya Sofia ou avec les débuts de l’intervention militaire direct en Libye.
En effet, le prédicateur de la mosquée Aya Sophia a monté sur le Minbar avec une épée ottomane à la main et le président Erdogan a évoqué le marin ottoman, Khair al-Din Barbarossa, au début de l’intervention militaire en Libye, ces liaisons ont étaient considérée comme de nouvelles indications ottomanes sur lesquelles le gouvernement turc est basé.
Le chercheur en affaires turques, Muhammad al-Jagl soutient l’analyse d’Al-Mirghani, expliquant que le président turc ne pense pas à attirer toutes les classes du peuple turc pour l’élire, mais il se dirige plutôt vers les nationalistes et le segment simple du peuple turc, ceux qui croient que les pressions externes sur l’État sont un signe qui confirme le patriotisme du gouvernement.
Le fait que les sanctions n’affectent pas les résultats des élections ne signifie pas que l’économie ou l’État turc ne sont pas affectés, comme le confirme al-Jagl qui indique qu’en cas de sanctions supplémentaires, Ankara sera en rendez-vous avec une nouvelle version de l’économie iranienne surtout avec la grande similitude des mécanismes de gouvernance pour les deux régimes, en particulier la manière de traitement avec la communauté internationale, de discours populiste et d’évoquer les forces du mal.
L’opposition turque a accusé le président Erdogan et son parti Justice et développement de former une institution armée similaire aux gardiens de la révolution iraniens, par le biais de ce que l’on appelle des «gardes de nuit», auxquels le gouvernement turc a donné des pouvoirs extraordinaires et ce qui a donné naissance à une force parallèle à la force de sécurité.
Le front de l’opposition et les choix pour la prochaine étape
Parallèlement aux mouvements internationaux contre le gouvernement turc, l’opposition se prépare à former un front uni pour affronter la coalition gouvernementale actuelle, représentée par le parti Justice et développement et le mouvement nationaliste de droite, selon ce qui a annoncé hier le chef du parti républicain du peuple, Kemal Kılıçdaroglu
Pour le chercheur Saleh Abdul Qadir, le front d’opposition uni est une étape importante mais qui reste insuffisante, car l’opposition turque travaille d’une manière traditionnelle par rapport à ce qui est présenté par le gouvernement justice et développement, qui a commencé à chatouiller les sentiments du public turc en promouvant l’idée du califat et du calife!
Le magazine turc Al Hayat Alhakikia, (La vraie vie) qui est proche du parti justice et développement au pouvoir, avait appelé dans son nouveau numéro, d’une manière direct à déclarer le califat en Turquie, elle a demandé: si ce n’est pas maintenant, quand? Si ce n’est pas vous alors qui? Rassemblez-vous pour le califat?
Parler d’histoire, de gloires et du pays en danger, selon Abdelkader, représente la ligne de base de la propagande du parti au pouvoir parmi ses partisans. Soulignant que l’opposition est tenue à partir d’aujourd’hui de se concentrer sur l’attraction des électeurs de l’AKP et de se rapprocher du peuple turc au lieu de parler dans des langues académiques et des statistiques.
Abdelkader souligne également que l’opposition doit focaliser ses efforts pour créer des alliances avec les anciens leaders du parti Justice et développement, en particulier l’ancien chef du parti, Ahmed Davutoglu et son adjoint, Ali Babacan, indiquant que les deux hommes sont capables de pénétrer les rangs des électeurs Justice et Développement et les attirer pour voter à son faveur. Cette position est la même, qui a été présentée par Al-Mirghani dans sa conversation avec l’Observatoire de Mena, indiquant que les antécédents islamiques et nationaux des deux hommes les aident à affronter le Parti de la justice et du développement dans leurs propres camps.
Pour Al-Marghani deux points peuvent conduire à l’échec du parti Justice et développement pendant les prochaines élections. Le premier est la nécessité pour l’opposition de s’ouvrir aux courants et aux personnalités islamistes opposées au parti de la justice et du développement, afin de gagner les voix d’un groupe d’islamistes et de nationalistes.
Le second : l’opposition doit être consciente que cette étape consiste à faire tomber le gouvernement Justice et Développement pas à gagner plus de sièges parlementaires, soulignant que tous les partis d’opposition doivent soutenir à l’unanimité toute alternative capable de remplacer l’actuel gouvernement, quels que soient ses orientations, tant qu’ils sont opposés au parti d’Erdogan.
Al-Marghani conclut en soulignant : « si le parti au pouvoir en Turquie passera les élections de 2023, il restera au pouvoir pour toujours, et que la facture de son destitution à l’avenir sera très chère. Mettre fin au pouvoir du parti ne sera qu’à travers un coup d’État militaire qui entrera le pays dans un cycle des coups d’État et les militaires prendront le pouvoir. L’intervention militaire étrangère peut en faire de la Turquie une autre Syrie ou un nouvel Irak.