Hussein Al Zoubi
Le rêve impérial perse a commencé à atteindre la Méditerranée. L’idée abstraite qui existait dans l’esprit des Perses depuis des siècles est devenue une réalité lorsque la catastrophe en Irak s’est produite. C’était et c’est toujours la plus grande catastrophe politique au Moyen-Orient, lorsque l’Irak a été détruit en tant que pays et institutions, et cela n’a pas suffi à faire tomber Saddam Hussein.
L’Iran, qui se considère comme une référence pour les chiites dans le monde, a tenté pendant les années suivant la chute de l’Irak, de cacher son projet national derrière le concept religieux et de porter la bannière des chiites, investissant dans les émotions des arabes chiites et suscitant des sentiments religieux violents.
L’Iran, après la chute du régime irakien, a obtenu la loyauté des provinces à majorité chiite du sud de l’Irak et a pris le contrôle de la classe politique dirigeante, tandis que les provinces dominées par les sunnites souffraient d’al-Qaïda et d’autres organisations extrémistes, la population civile se retrouvant entre les pratiques brutales des milices extrémistes et la négligence délibérée du gouvernement irakien « chiite ».
La politique américaine confuse
L’Iran a trouvé dans la politique américaine confuse en Irak pendant le mandat du président Obama une occasion d’engloutir complètement l’Irak. C’est ce qui a poussé l’ancien ministre saoudien des Affaires Etrangères, Saud Al-Faisal, à dire aux américains: « Vous avez présenté l’Irak à l’Iran sur un plateau d’argent ».
Les États-Unis, après avoir éliminé al-Qaïda en Irak en formant des groupes armés sunnites locaux ont décidé de se retirer et de quitter l’Irak sans attendre la stabilité politique. Simultanément le gouvernement irakien fidèle à l’Iran a commencé à poursuivre les groupes formés par les États-Unis, sous prétexte de terrorisme.
Après le retrait américain, l’Iran, par l’intermédiaire de son homme fort en Irak, le Premier ministre Nouri al-Maliki, a réussi à contrôler la vie économique et l’Irak est alors devenu un marché pour les produits iraniens de médiocre qualité. Pendant le mandat de Maliki en tant que Premier ministre, qui a duré huit ans, aucune usine n’a été établie en Irak, le niveau d’éducation est tombé aux normes internationales les plus basses et le pays riche en pétrole s’est transformé en consommateur de drogue d’Afghanistan via l’Iran. l’Irak a atteint un niveau de corruption élevé , dépassant les normes mondiales ; les quotas sectaires ont été renforcés dans toutes les institutions de l’État de sorte que les sunnites ont été marginalisés.
Le printemps arabe
Le printemps arabe qui a débuté en Tunisie a atteint l’Irak, en particulier en 2013 dans les provinces sunnites qui ont connu des manifestations pacifiques et des sit-in.
À l’époque, le régime d’Assad était sur le point de tomber, ce qui a apporté un soutien moral aux manifestations en Irak.
L’Iran a senti le danger pour ses allié à Damas et à Bagdad, et Téhéran a dû agir rapidement.
En Irak, Nouri al-Maliki a donné pour instruction à l’armée de prendre d’assaut les sit-in dans les villes sunnites et a arrêté des centaines de personnes pour appartenance à l’Etat Islamique en Irak, connu plus tard sous le nom d’ISIS.
Quant à la Syrie, Téhéran a exigé que le Hezbollah libanais entre en Syrie et lutte contre l’armée libre, qui contrôlait environ 70% de la superficie de la Syrie. À cette époque, les organisations extrémistes n’étaient que de petits groupes sans valeur.
L’entrée du Hezbollah en Syrie n’a pas beaucoup changé l’équation, de sorte que l’Iran a été contraint d’envoyer des volontaires chiites au Pakistan et en Afghanistan et a formé des milices armées pour combattre sous le slogan de la protection des sanctuaires religieux en Syrie. Parmi ces milices figurent la « Brigade Zaynabiyoun » et la « Brigade Fatimiyoun ».
L’opinion publique mondiale à l’époque était favorable à la révolution syrienne contre le régime d’Assad, qui a commencé à utiliser des armes chimiques, et il semblait que la pression sur lui augmentait.
Fin 2013 et début 2014, des explosions ont commencé à se produire en Irak presque quotidiennement. A l’été, environ 700 membres de « L’État Islamique en Irak » avaient réussi à s’échapper des prisons contrôlant la ville de Mossoul, la deuxième plus grande ville d’Irak. Plus surprenant encore, Nuri al-Maliki a ordonné à l’immense armée irakienne de se retirer de Mossoul et de ses environs, leur laissant la voie ouverte pour s’étendre vers d’autres villes sans aucune résistance.
Les progrès militaires controversés de l’Etat Islamique en Irak et son annonce d’aller en Syrie étaient une opportunité historique pour l’Iran qui l’avait longtemps recherchée.
À la demande de l’Iran, l’autorité religieuse chiite en Irak a appelé à la formation d’une soi-disant « foule populaire » dans le but de combattre l’État Islamique auquel pendant ce temps, la coalition internationale a déclaré la guerre.
La foule populaire est constituée de milices armées qui lancent des slogans sectaires.
Ces milices ont commis des violations contre des civils dans les villes du gouvernorat de Diyala, dont la plus célèbre est Baquba.
Diyala … le voisin meurtrier
Diyala est située dans l’est de l’Irak, à 60 km au nord de la capitale, Bagdad. Sa population est estimée à 1.2 million d’habitants.
Diyala est la seule province à majorité arabe sunnite irakienne qui a des frontières avec l’Iran, tandis que les autres provinces, ayant une frontière avec ce pays, sont majoritairement chiites ou kurdes sunnites.
Diyala a acquis son importance stratégique pour l’Iran pour quatres raisons:
La première est sa proximité avec la capitale, Bagdad.
La deuxième: la longueur de ses frontières avec l’Iran, 240 kilomètres.
La troisième raison : Diyala est la première étape sur la route plus courte pour atteindre la Syrie, point d’accès à la mer Méditerranée. Une fois Diyala sous contrôle, l’Iran arrivera dans la province d’Al Anbar, voisine de la Syrie.
Quatrième raison: elle est considérée comme l’un des principaux points d’entrée des produits iraniens, ainsi qu’un point de passage pour les pélerins iraniens vers Nadjaf et Karbala, et revêt donc une importance économique et sociale.
Par conséquent, l’Iran a amorcé le changement démographique après la chute du régime de Saddam Hussein 2003.
Malheureusement pour l’Iran, malgré l’évolution démographique imposée, la population de la province de Diyala n’est pas aussi fidèle envers l’Iran que les provinces chiites.
Changement démographique
Après la chute du régime, l’Iran a envoyé à Diyala des milices formées en Iran dans les années 1980, incluant des combattants opposés à Saddam Hussein.
Ces milices ont mené des opérations anti – sunnites qui ont forcé des milliers de citoyens du gouvernorat à émigrer dans des régions plus sûres. Certains d’entre eux ont quitté l’Irak et se sont dirigés vers la Syrie, qui a accueilli environ un million et demi d’Irakiens en 2004. D’autres ont déménagé en Jordanie et en Égypte.
Au cours de la période 2006-2007, le pays a connu la guerre civile après le bombardement du « sanctuaire de Samarra ». A Diyala, une élimination plus radicale encore a été effectué par la milice Badr dirigée par Hadi Al-Ameri, qui a vécu en Iran pendant plus de 40 ans.
L’ancien Premier ministre Nouri Al-Maliki a distribué les terres de la province aux employés, par le biais de décisions d’octroi de terres, par exemple pour les soi-disant enfants des martyrs de la population chiite du sud.
Diyala entre l’Etat Islamique et les milices
En 2014, l’Etat Islamique est entré à Diyala et, à cette occasion, le gouvernorat a été témoin du déplacement de civils, lequel a augmenté avec le début des batailles contre l’État islamique. En conséquence, l’organisation extrémiste a été vaincue et des milices pro-iraniennes ont pris le contrôle de Diyala.
L’organisation est entrée à Diyala en 2014 et, au moment où elle est entrée dans la province, il y a eu des déplacements de civils.
Ces mouvements ont augmenté à mesure que les batailles contre l’organisation d’État ont commencé. En conséquence, l’organisation extrémiste a été vaincue, et les milices pro-iraniennes contrôlaient Diala.
Selon le chercheur irakien Abdullah Al-Thuin., ces milices n’ont permis que le retour de 2000 familles sur 150.000 familles déplacées.
Le déplacement de population qui a suivi la défaite de Daech a été effectué principalement par la milice « Asaib Ahl Al-Haq » dirigée par « Qais Khazali », qui a fait défection à la milice « Mahdi Army » en 2007 et par Nouri Al-Maliki, l’homme de l’Iran en Irak, considéré comme l’un des plus grands partisans de ces milices. Cela a été confirmé par le Centre américain d’études du Moyen-Orient – Garniki
Al-Anbar… traversant en Syrie
Le gouvernorat Al-Anbar est situé dans l’ouest de l’Irak, et c’est le plus grand gouvernorat avec une superficie de 138 500 kilomètres carrés, constituant un tiers de l’Iraq, avec une population de 1,7 million d’habitants, tous sunnites.
Il borde la Syrie, la Jordanie et l’Arabie Saoudite, ce qui lui a donné une importance stratégique pour l’Iran.
Le contrôle de cette vaste zone est difficile, et Nuri al-Maliki a donc décidé d’annexer la région de Nukhaib, qui fait partie d’Anbar, au gouvernorat chiite de Karbala. Ironiquement, la région d’Al-Nukhaib est plus grande que le gouvernorat de Karbala.
Toutes les routes internationales menant à l’Arabie Saoudite, à la Jordanie et à la Syrie passent par la région d’Al-Nukhaib jusqu’au poste frontière d’Arar avec l’Arabie Saoudite ainsi qu’à la frontière jordanienne en plus du centre frontalier syrien, Albukamal.
Ces points de passage sont gérés par des responsables civils et militaires irakiens, tandis que la milice de » La foule populaire » contrôle de vastes zones de ces points de passage.
Ces milices sont entrées du côté syrien de la frontière avec l’Iraq et ont pris le contrôle de la ville d’Albukamal et de la ville d’Al-Mayadeen. Les deux villes appartiennent au gouvernorat syrien de Deir Ezzor.
Elles sont devenues un lien entre la présence iranienne en Irak et la présence iranienne en Syrie, ainsi qu’un point de transit pour le transfert d’armes iraniennes vers la Syrie. De nombreuses photos en attestant ont été publiées par les agences de presse du commandant iranien de la « Force Qods » en Syrie avec des miliciens.
Cet article reflète le point de vue de l’auteur, ce n’est pas nécessairement l’opinion de l’Observatoire MENA.
Toute publication et rédaction sont conservées dans MENA Media Monitor