Le chef du mouvement tunisien, Ennahda, Rached Ghannouchi, renouvelle son soutien inconditionnel au gouvernement de «Hicham Mechichi», en l’expliquant par ses appréhensions que la Tunisie pourrait être victime d’un vide politique et gouvernemental, si «Mechichi » présente la démission de son gouvernement.
Il est à rappeler que «Mechichi» a exprimé son refus total de soumettre la démission du gouvernement, en le considérant comme étant des « propos vides de sens ».
Il convient de dire dans ce contexte que la Tunisie traverse par une grave crise politique suite au remaniement ministériel entrepris par le chef du gouvernement «Mechichi», en limogeant 11 ministres et les remplaçant par d’autres dont certains soupçonnés de corruption. Cela a poussé le président tunisien, Kais Saïed, à rejeter ce remaniement.
Mechichi ou la libanisation de la Tunisie
Commentant les déclarations de «Ghannouchi», l’analyste politique tunisien, «Mohamed Marzouk», a considéré qu’elles portent une seule interprétation : mettre les forces politiques face à deux options, soit le fait d’accepter «Mechichi» et son remaniement, soit la Tunisie entrerait dans le tunnel de vide gouvernemental dans lequel était entré le Liban il y a environ 7 mois, en estimant que ces déclarations indiquent que le mouvement va avorter tout gouvernement qui pourrait succéder au gouvernement «Mechichi».
Marzouk a indiqué également qu’Ennahda mène aujourd’hui une bataille déchirante contre la présidence, qui a créé une situation d’intransigeance des positions politiques entre les deux parties en considérant que l’équation politique en Tunisie n’est pas divisible par deux, et que la partie qui perdra la bataille du remaniement gouvernemental va perdre beaucoup de son influence sur la scène. Il a ajouté que la crise a commencé à être liée aux positions personnelles plutôt qu’aux positions politiques entre les trois présidences.
Il convient de rappeler que des sources tunisiennes ont révélé auparavant, que les remaniements introduits par Mechichi visent à geler l’influence du président au sein du gouvernement en excluant les ministres qui lui sont fidèles et en les remplaçant par de nouveaux ministres plus proches du mouvement Ennahda.
Il est à noter aussi que le mouvement Ennahda avait menacé de descendre dans la rue pour imposer le remaniement ministériel, ainsi que des dirigeants du mouvement ont menacé de dépasser le président s’il continuait à refuser de recevoir les nouveaux ministres pour prêter le serment constitutionnel et de commencer d’exercer leurs fonctions.
En outre, Marzouk a jugé que si « Mechichi » continue ou démissionne, le problème ne sera pas résolu, en considérant que le chef du gouvernement n’est pas la principale partie dans la crise, mais plutôt le conflit autour des prérogatives mené par le président du parlement, «Ghannouchi», contre le président Saïed.
Marzouk a par ailleurs estimé que la Tunisie est effectivement entrée dans un scénario similaire à celui libanais, en termes de la crise gouvernementale, de la crise économique et la crise de vie et son impact sur le peuple, en indiquant que la seule différence actuellement entre la Tunisie et le Liban réside dans le degré de la profondeur de la crise.
Le peuple exclu de l’équation
De son côté, l’analyste politique «Mourad Salim» a dit que le peuple tunisien est exclu de l’équation du conflit politique, surtout qu’il est la partie la plus touchée et la plus affectée par cette situation d’intransigeance politique non justifiée et n’a rien avoir avec l’intérêt du citoyen. Il a expliqué : « Il n’y a aucune justification ou intérêt pour le pays de cette situation où chaque partie s’en tenir à son opinion surtout de la part de Mechichi, qui pourrait mettre un terme à tout cela en remplaçant les ministres objet du conflit, au lieu de bloquer les intérêts du pays, de la population et d’enraciner une crise inventée ».
Salim a rappelé que les causes de la crise résident dans la volonté d’Ennahda d’exclure totalement le président politiquement, surtout après les nombreux appels à abandonner le régime actuel en revenant au régime présidentiel, en expliquant que le régime politique actuel a bloqué le pays et a provoqué des conflits entre les différentes composantes au pouvoir.
Il est à noter que le secrétaire général de l’UGTT (Union générale tunisienne du travail), Noureddine Taboubi, a confirmé que «les informations qu’il reçoit indiquent que le président de la République« Kais Saïed » exige la démission du chef du gouvernement, « Hichem Mechichi» de son poste afin que le dialogue national auquel a appelé l’UGTT démarre pour sauver le pays de la crise.
Dans la même lignée, «Salim» a ajouté : «Même si le Michichi part, Ghannouchi restera, et le conflit autour du pouvoir se poursuivra, ainsi que Ennahdha ne jette pas l’éponge facilement. Au contraire, il va pousser le pays dans un vide gouvernemental pour intimider le président et ses opposants, qui renverseraient le gouvernement de Mechichi ». Il a estimé que la meilleure solution est de revenir à la case départ : élire un gouvernement de transition qui veillera sur l’amendement de la Constitution actuelle ou la préparation d’une nouvelle Constitution pour le pays, et de superviser de nouvelles élections générales, dans un délai maximum de deux ans.
Salim a noté que tout mouvement politique loin de l’approche précédente ne résoudra pas le problème, même s’il contribue à reporter une catastrophe humanitaire, économique et politique dans le pays, selon ses propos.
Il convient de rappeler que la Tunisie connait des tensions politiques et constitutionnelles liées au refus du président Kais Saïed de recevoir les nouveaux ministres pour prêter le serment constitutionnel, en jugeant qu’il y a des «ministres corrompus» parmi eux. Certains estiment que les nouveaux ministres ne peuvent pas exercer leurs fonctions avant de prêter serment devant le président, tandis que d’autres estiment que le fait d’obtenir la confiance du Parlement est suffisant.
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