Près de deux semaines après les événements sanglants survenus sur la côte syrienne, qui ont fait plus d’un millier de morts et des dizaines de milliers de déplacés, la question est revenue sur le devant de la scène politique, notamment en ce qui concerne le statut des personnes déplacées de la côte syrienne vers la base russe de Hmeimim, dans le nord-ouest du pays, et les raisons qui ont poussé la Russie à leur fournir une protection.
Les violences ont commencé par des attaques menées par les restes de l’ancien régime contre les points de contrôle des forces de sécurité syriennes. Ces attaques étaient organisées et coordonnées, et comportaient des dimensions extérieures, notamment de la part de la Russie par l’intermédiaire de la base de Hmeimim, qui abrite aujourd’hui des officiers de haut rang et des dirigeants de l’ancien régime.
Néanmoins, ce qui a exacerbé la situation, c’est l’intégration de certaines factions armées dans l’appareil de sécurité générale syrien, qui est encore incomplet et limité à l’aspect formel sans mise en œuvre réelle, ce qui s’est reflété dans les violations qui ont eu lieu sur la côte. La violence a forcé certains habitants des villes et villages côtiers à fuir, certains se réfugiant au Liban, tandis que d’autres se sont cachés à l’intérieur de la Syrie dans des vergers, des montagnes et des zones reculées. Des milliers de civils ont également trouvé refuge dans la base aérienne russe de Hmeimim.
Reuters a cité une femme de 34 ans, Rana, qui a déclaré s’être réfugiée avec sa famille dans la base de Hmeimim, à 11 kilomètres de son village de Sinobar, à majorité alaouite, après s’être réveillée au son de coups de feu. Quelques jours plus tard, elle est retournée chez elle après avoir confirmé que les violences avaient cessé et qu’un calme relatif était revenu dans la région.
Toutefois, la situation ne semble pas s’être totalement stabilisée. Ratib Shaabo, médecin et écrivain syrien basé en France et originaire de Lattaquié, a déclaré que la situation était toujours tendue, mais qu’il n’y avait aucun moyen de documenter ou de publier ce qui se passait. Shaabo a confirmé qu’il avait reçu des informations selon lesquelles l’internet avait été coupé dans certaines zones de la côte syrienne et que des atrocités avaient été commises contre des civils, en particulier dans le village de Demserkho, dans la ville de Jableh.
Les alaouites, quant à eux, sont en état d’alerte en raison de leurs craintes profondes à l’égard des islamistes et redoutent toute confrontation avec eux. Certains d’entre eux se méfient également de plus en plus des autorités actuelles en Syrie.
À la lumière de ces développements, deux sources syriennes parmi les personnes déplacées à la base de Hmeimim ont démenti les informations selon lesquelles les civils qui s’étaient réfugiés à la base après l’escalade de la violence sur la côte syrienne étaient en train de la quitter. Les médias ont souligné que les Russes n’ont forcé personne à quitter la base, contrairement à ce qu’affirment les parties proches de la nouvelle administration syrienne.
Cela se produit alors que la direction de la base russe a publié une déclaration il y a deux jours, appelant les civils qui se sont réfugiés dans la base à partir, en invoquant l’amélioration des conditions de sécurité. L’une des sources a expliqué que les Russes parlent deux langues différentes, une pour les réfugiés de la base et une autre pour le monde extérieur. La source a annoncé : « Ils nous ont donné une explication pour la déclaration publiée par les dirigeants de la base après que nous ayons rencontré un certain nombre d’officiers ».
Le commandement de la base russe a confirmé que les forces stationnées à Hmeimim avaient déployé de grands efforts pour sauver les civils, mais il a souligné les ressources limitées de la base et son incapacité à fournir des conditions de vie adéquates pendant une période prolongée. Il a aussi appelé les personnes déplacées à chercher « des moyens de se réconcilier avec les autorités syriennes et de reprendre une vie normale ».
Le commandement russe fournira des rations alimentaires aux civils qui partiront le 16 mars afin de s’assurer qu’ils disposent des besoins de base pendant la période de transition vers leur région d’origine, indique le communiqué. Ce dernier souligne également la poursuite des efforts humanitaires et diplomatiques visant à assurer la sécurité des civils et à leur fournir un environnement sûr.
Le communiqué indique que le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté une résolution appelant à la désescalade dans le cadre des efforts diplomatiques déployés par les États-Unis et la Russie pour garantir le calme et la stabilité dans le pays. Il a également mis en garde contre toute tentative de fomenter le chaos ou de répéter les événements observés au Sahel au début du mois, soulignant que les mesures actuelles visent à assurer la sortie en toute sécurité des civils alors que les efforts de réconciliation avec les nouvelles autorités se poursuivent.
Accusations d’ingérence de Moscou dans le soutien aux personnalités militaires de l’ancien régime :
Dans cette atmosphère tendue, les accusations se multiplient à l’encontre de Moscou d’intervenir en faveur de personnalités militaires liées à l’ancien régime lors des récents événements sur la côte. Des sources proches des autorités syriennes ont fait état d’une coordination entre la base de Hmeimim et les combattants des résidus de l’ancien régime pour soutenir ce qu’elles ont décrit comme la « libération de la côte ».
Des enregistrements audio de combattants des « restes du régime » ont été divulgués, documentant des communications avec la base russe, y compris des promesses de soutien logistique et militaire pour ces groupes. Des sources proches des autorités syriennes et des médias qui leur sont affiliés ont rapporté que les soldats russes traitent avec « souplesse » ces éléments militaires de l’ancien régime, leur promettant des choses en échange de leur fermeté sur le terrain.
Selon ces sources, la base de Hmeimim a fourni des armes et des équipements à ces groupes par une porte située près du village de Bustan al-Basha, à environ 2,7 kilomètres de la base. Cette dernière a aussi fourni des services médicaux aux « restes du régime » blessés par une porte militaire donnant sur la zone d’al-Batra à Jableh. Les enregistrements ont confirmé que des officiers russes avaient demandé aux combattants de tenir 48 heures contre les forces de sécurité publique, en attendant l’arrivée du soutien attendu de la base russe, qui attendait l’approbation finale du Kremlin pour une intervention directe, selon les médias pro-Damas.