Dix ans est l’âge de la révolution syrienne qui a éclaté en 2011 contre le régime tyrannique qui dirigeait la Syrie pendant des décennies, une extension de ce qu’on appelle les révolutions du Printemps arabe, qui commençaient en Tunisie, puis en Égypte, la Libye et le Yémen.
Au cours de ces dix ans, la Syrie a subi des ravages ayant touché la plupart de ses villes et campagnes, pour que des millions de Syriens deviennent des déplacés hors du pays, dans des pays arabes voisins ou dans des pays d’asile européens, et cela s’est accompagné d’interventions militaires et politiques extérieures, et l’entrée, sur une base sectaire, des factions combattantes de l’extérieur des frontières des deux côtés. Cela a ouvert la porte à la montée des mouvements extrémistes et le terrorisme représentés par le Front Al-Nosra et l’organisation de l’État islamique. Plus tard, en parallèle, plusieurs entités d’opposition ont fait leur apparition au fil des années, et elles ont commencé par le travail politique, à partir du Conseil national syrien, puis la Coalition nationale pour les forces de la révolution et de l’opposition, qui regroupait de nombreux courants traditionnels en Syrie, tels que le mouvement de gauche, le mouvement des Frères musulmans, et de nombreuses personnalités indépendantes de libéraux, de laïcs et de représentants d’organisations de la société civile.
Dans cette étude, nous essayons d’analyser le rendement de l’un de ces courants d’opposition. Il s’agit du courant islamique représenté par les Frères musulmans en Syrie avant la révolution, puis on tentera d’examiner le rendement du groupe après la révolution, et la forme de cette présence représentée par les rendements des représentants des Frères musulmans et leurs tentatives de s’imposer en force sur la scène politique d’opposition syrienne et prendre souvent le devant de la scène.
L’objectif général de cette analyse est d’essayer de répondre à deux questions problématiques, à savoir :
Primo : Serait-il possible d’ouvrir un dialogue avec le mouvement des Frères musulmans alors qu’ils portent une idéologie religieuse fermée?
Secundo : le rendement des Frères musulmans au cours des dix dernières années a-t-il reflété un changement au niveau de leur stratégie envers les valeurs de l’époque, c’est-à-dire les valeurs de modernité, de civilisation, de démocratie, de citoyenneté et autres?
A travers cette lecture, on essaye d’adopter plusieurs approches, dont la plus importante est l’approche d’investigation autour des positions du groupe, et le récit historique dans certaines étapes. Et il est également possible de s’appuyer sur la théorie fonctionnalisme afin de jeter la lumière sur les deux fonctions déclarée et implicite dans le rendement des Frères musulmans, et sur une base critique qui touche ce rendement et tente de saisir ses objectifs en fonction des données sensorielles des positions, et des sorties médiatiques des membres et des Frères musulmans et leurs dirigeants ainsi que leurs documents publiés.
Depuis la fondation de la branche des Frères musulmans en Syrie en 1942 par le docteur Moustapha Siba’i, leur présence sur la scène politique avait commencé, leur entrée ultérieure au Parlement, en passant par la prise de la décision d’interdire le groupe, puis leur tentative de se soulever contre le régime, et les événements sanglants qui avaient suivi dans la ville syrienne de Hama, en arrivant à leur tentative d’entrer en contact avec les forces politiques de l’opposition à l’intérieur à travers ce qu’on appelait le printemps de Damas en 2005, et puis la tentative de s’allier avec le vice-président dissident syrien Abdel Halim Khaddam, dans ce qu’on appelait à l’époque le Front de salut national, qui a été condamné par beaucoup à cause de cette alliance avec un symbole de premier plan de l’ancien régime, accusé de corruption dans de nombreux dossiers. Néanmoins, le groupe avec sa logique entrepreneuriale essayait, selon son idée, à travers cette alliance, d’encourager les autres à quitter le régime, et d’exploiter les connexions de Khaddam avec personnalités éminentes de la communauté alaouite. Deux choses qui n’ont pas eu lieu. Par conséquent cette alliance a échoué et a pris fin après une très courte période.
Avant cela, plus précisément en 2004, il avait lieu l’annonce du projet politique pour la Syrie Future tel que le voyait le groupe, qui contenait un certain nombre de points pragmatiques et problématiques en même temps, à l’instar du discours du groupe sur le pluralisme politique comme un produit naturel de la liberté de pensée et de croyance. Néanmoins, cela n’a pas été appliqué par la suite. Les parenthèses sur le mot État « moderne » dans la vision du groupe de la Syrie Future indiquent une réserve, et probablement l’objection de principe des Frères musulmans contre ces concepts contemporains, en faveur de la gouvernance comme concept idéologique sur lequel le groupe a construit sa littérature.
Le projet parle également de ce que la communauté appelle l’État contractuel, mais avec des termes anciens tels que l’imamat, les oulémas de Fiqh, Ahl Al-Hall Wal-aqd (les spécialistes de jurisprudence), et d’autres concepts qui ne correspondent pas à l’époque mais ils avaient leur contexte au passé.
Selon tout cela, le groupe a tenté, de manière pragmatique, de s’introduire dans l’action politique, notamment après le transfert du pouvoir après la mort de Hafez al-Assad à son fils Bachar, que beaucoup pariaient sur une possible réforme pendant son règne, mais cela ne s’est pas produit jusqu’à mi-mars 2011 lorsque les Syriens se sont révoltés contre le régime.
Là, le groupe a cherché de s’infiltrer dans le corps politique de l’opposition syrienne en assistant aux congrès qui tentaient de mettre de pair le mouvement populaire et de l’exprimer politiquement, comme le congrès de Bruxelles, et à travers la porte du Conseil national dans une période ultérieure, qui a été formé après la révolution, et les tentatives qui ont révélé dans de nombreuses étapes et stations le désir des Frères musulmans de prendre le devant de la scène de l’opposition, accompagnée d’un discours arriéré. Et cela n’a pas beaucoup changé avec la formation de la Coalition des forces nationales de la révolution et de l’opposition, en particulier après la résolution de la décision onusienne 2254 des par le Conseil de sécurité des Nations Unies.
On peut classer le rendement des Frères musulmans après la révolution syrienne de 2011 selon deux niveaux :
Le premier : est idéologique, fidèle aux principes desquels le groupe a puisé ses ressources intellectuelles à travers l’idée de gouvernance qui a été évoquée par de nombreux observateurs du groupe et ses médias au cours des dix dernières années.
Le second : est pragmatique qui tente de se repositionner en fonction des données de terrain, et la tentative de se faufiler sur le devant de la scène politique d’opposition, parfois accompagnée (d’un grand renoncement au pouvoir) en l’atteignant, et d’une tentative de manipuler de nombreux termes pour faire passer un agenda préparé d’avance dans la pensée des Frères musulmans.
Sur la base de tout ce qui précède, on peut tenter de répondre aux deux questions principales à partir desquelles est né un ensemble de déterminants selon lesquels le dialogue avec le groupe doit être ouvert. Un dialogue qui n’accepte pas l’exclusion. Le plus important de ces déterminants réside dans les éléments suivants:
Premièrement : accord final avec les Frères musulmans sur la diversité de la société syrienne en tant que principe constitutionnel suprême, suivi par des articles constitutionnels clairs qui garantissent les droits de chacun en tant que citoyen.
Deuxièmement : l’accord avec les Frères musulmans sur la forme prochaine de l’Etat et enlever ses préoccupations par le dialogue sur le concept d’un État civil, qui parraine et préserve le droit de croire et de pratiquer des rites religieux pour tous ses citoyens.
Troisièmement: accorder aux Frères musulmans le droit de pratiquer sa propagande sans faire de préjudice aux principes constitutionnels antérieurs et le droit de ses membres en tant que citoyens de se présenter à des fonctions publiques.
Sans ces déterminants, la polémique avec les Frères musulmans demeure toujours, mais cela ne peut en aucun cas exclure ses membres de leurs droits, et l’exercice de ces droits, en tant que citoyens, d’autant plus que la question syrienne se complique davantage, et les ingérences étrangères avec lesquelles les Syriens souffrent dans le pays sous le poids de la pauvreté, de la faim et de la peine. A l’étranger, ils souffrent sous les étiquettes de l’asile, le désir effréné de revenir au pays et une contribution à la construction de leur État diversifié, sur la base de la justice, de la liberté, de la citoyenneté et de la diversité.