En septembre, nous avons eu l’occasion d’examiner les relations de la Bulgarie avec le Moyen-Orient d’un point de vue actuel et historique. Denys Kolesnyk en a discuté avec Vladimir Chukov, professeur d’université bulgare et chercheur dans le domaine de la politique du Moyen-Orient, des études islamiques et de la conflictologie. Depuis 2007, M. Chukov est professeur et a enseigné dans plusieurs universités bulgares. Il enseigne actuellement à l’université de Ruse (Bulgarie) et à l’Académie bulgare des sciences.
Le Moyen-Orient est une région assez dynamique avec de nombreux intérêts régionaux et extrarégionaux qui se chevauchent. Quels sont les principaux changements dans la région et comment pourriez-vous les expliquer ?
La notion du Moyen-Orient est avant tout géographique, mais il s’agit d’un ensemble de plusieurs sous-régions, qui présentent elles-mêmes des profils différents en termes politiques, économiques, militaro-stratégiques, sociaux et démographiques. Ces dernières années, il est devenu avant tout synonyme des pays riches du Golfe Persique, qui ont commencé à jouer un rôle suprarégional grâce aux énormes atouts matériels accumulés. Dans le même temps, la compréhension du Moyen-Orient inclut également les Etats pauvres et souvent déchirés par des conflits internes, comme le Yémen, la Syrie, le Liban, la Lybie et le Soudan, en contraste total avec les pays riches de la région mentionnée. Si nous devons décrire brièvement les processus qui ont dominé ces dernières années, il s’agit d’une forte polarisation le long des axes suivants « riches-pauvres », « stables-déstabilisés », « centres régionaux-périphérie régionale ».
Tout cela conditionne la transformation du Moyen-Orient en plusieurs centres locaux dont les fonctions s’excluent mutuellement. Ainsi, par exemple, depuis les années 1980 jusqu’en 2015 environ, lorsque l’actuel prince héritier Mohammed ben Salmane est devenu le chef de l’Arabie saoudite, la région du golfe Persique est devenue « la pompe mondiale du pétrole ». Environ deux tiers des gisements mondiaux de l’or noir se trouvent là-bas et, dans les années 1980, l’ancien président américain Ronald Reagan a renversé le bloc communiste de l’Europe de l’Est, y compris l’Union soviétique.
Aujourd’hui, la région peut être qualifiée d’ « immense caisse à monnaie » qui est devenue le « lieu de prédilection des chasseurs d’argent du monde entier ». Ce n’est pas un hasard si la plus grande plateforme immobilière électronique du monde s’y trouve. Cela s’est produit grâce au fait que l’outil de politique étrangère flexible a été ajouté à l’arme pétrolière, qui a été mesurée et mise en pratique par les deux Mohammeds – Mohammed ben Salmane et son professeur politique, l’actuel président des Émirats arabes unis, Mohammed ben Zayed. Mon opinion personnelle est que ce dernier adapte de manière très flexible les principes de la politique étrangère britannique traditionnelle, à savoir « il n’y a pas d’amis éternels et il n’y a pas d’ennemis éternels, il y a des intérêts éternels ».
Pourtant, on ne peut pas parler de démocratie, telle que nous la comprenons et l’appliquons dans le monde euro-chrétien. Pendant deux années consécutives, 2022 et 2023, le président américain Joe Biden a organisé ce qu’on appelle le « Democracy Forum » appliquant les critères américains d’un régime démocratique. Du Moyen-Orient, seuls l’Irak et l’État d’Israël ont été invités. Même les pays où le pluralisme des partis est traditionnel et où se tiennent des élections législatives permanentes, comme l’Égypte, le Liban, le Maroc et la Turquie, n’ont pas été invités.
L’entretien de Mohammed ben Salmane accordé au journaliste du magazine américain « Atlantic » Graeme Wood en avril 2022 restera significatif à cet égard. Il y explique de manière très complète et logique pourquoi les modèles de régimes politiques en Europe et en Amérique ne sont pas applicables dans des sociétés comme l’Arabie Saoudite. Ces divergences de principe ont fortement « gonflé » les tensions entre Riyad et Washington, et notamment, sur le plan personnel, entre Ben Salmane et Joe Biden.
Outre « l’État idéal » arabe construit par les pays du Golfe Persique (selon l’expression d’Aristote), on observe également des processus caractéristiques des États en faillite, comme ceux des pays périphériques du Moyen-Orient. Le mélange entre un profil démographique turbulent, le manque de ressources naturelles, une corruption écrasante et un pouvoir dictatorial a fait de la périphérie un volcan de migrants cherchant leur bonheur en Europe, mais aussi de radicaux religieux qui voient l’idéologie du fondamentalisme islamique comme un outil pour la revanche des régimes autoritaires. La jeune génération, qui souffre le plus du chômage, accuse les dirigeants locaux pour son malheur social et son désespoir personnel. Elle est confrontée au dilemme « radicalisation ou migration ».
L’importance du Moyen-Orient est également accrue par sa proximité géographique avec l’Europe, qui est l’arène de la politique mondiale depuis plus de deux millénaires et qui est actuellement (après la création de l’Union européenne) l’un des principaux centres politiques et économiques du monde. Le Moyen-Orient et l’Europe sont les deux faces d’une même médaille. La mer Méditerranée, a l’exception de l’époque coloniale est appelée à stimuler la création d’un partenariat et d’une coopération mutuellement avantageuse.
Après l’invasion russe de l’Ukraine, nous observons un positionnement plus indépendant des pays de la région et l’émergence d’un leader de facto: l’Arabie Saoudite. Quelle est l’implication de la Bulgarie dans la région ? Quelles sont les priorités de la politique étrangère de Sofia dans la région MENA ?
Incontestablement, l’Arabie Saoudite occupe la première place dans la région depuis que Mohammed ben Salmane a pris le pouvoir à Riyad. Il a fait passer son pays du XXe siècle islamique au XXIe siècle de progrès, de tolérance et de défense très habile des intérêts nationaux. Nous constatons que Riyad participe directement à chaque événement international important ou bien son ombre est visible la-bas.
Dans le même temps, la Bulgarie et la diplomatie bulgare ont eu besoin de suffisamment de temps pour s’adapter aux nouvelles réalités mondiales et régionales. Surtout, la réforme du gouvernement bulgare, du ministère des Affaires étrangères, a été indispensable, et à partir de là, il a fallu changer lentement et progressivement les priorités dans la région MENA. Jusqu’à la chute du régime communiste, sous les diktats de Moscou, la diplomatie bulgare mettait l’accent sur des relations actives avec ce que l’on appelle les « régimes et organisations révolutionnaires ».
Nous parlons de la Libye de Kadhafi, devenue le plus grand marché mondial du travail pour les travailleurs bulgares, de la Syrie, de l’Irak, où régnaient les partis Baath, de l’Algérie, de la République populaire démocratique du Yémen et de l’OLP. Les liens étaient principalement idéologiques et les relations commerciales et économiques se développaient sur cette base. En même temps, cela a été un désastre pour notre commerce extérieur, car les organisations bulgares travaillaient à crédit et beaucoup de prêts accordés n’étaient pas restitués ou étaient considérablement réduits.
Après 1990, Sofia s’est lentement adaptée à ce qu’on appelle « régimes modérés » dans la région MENA, qui sont devenus la principale priorité de la diplomatie bulgare dans la région. La même année, les relations diplomatiques avec l’État d’Israël ont été rétablies, dont la rupture a constitué une énorme erreur diplomatique. Sur directive de Moscou, la Bulgarie a retiré son personnel diplomatique et a ainsi rompu les liens historiques qu’elle entretenait avec la communauté juive bulgare, petite mais suffisamment influente. Il s’agit du fait que la Bulgarie est le seul pays d’Europe (avec le Danemark) qui avait sauvé sa population juive de la déportation organisée par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Lentement et plutôt timidement, Sofia a établi des relations diplomatiques avec les pays du Golfe Persique (à l’exception du Koweït), dépendantе du cliché idéologique imposé par les communistes sur le soutien de ces pays à l’islam radical. Cela était dû à l’interprétation unilatérale de l’invasion de l’armée soviétique en Afghanistan (1979-1989) qui a été expliquée comme une expression de « l’internationalisme prolétarien ».
Logiquement, la réforme devait également concerner le personnel, puisque la majorité des diplomates bulgares arabophones étaient diplômés des universités soviétiques et avaient beaucoup de mal à se débarrasser des clichés idéologiques enseignés dans les universités et académies communistes.
Comment caractériseriez-vous les relations bilatérales avec les principaux acteurs régionaux – Ankara, Le Caire, Riyad et Doha ?
La Bulgarie pratique le principe da la différenciation obligatoire dans ses relations avec les différents pays arabes. Cela est dû non seulement aux accumulations historiques, mais aussi aux relations économiques qui ont façonné le niveau politique. La Bulgarie entretient des relations privilégiées avec la Turquie, car nous sommes voisins et il existe une importante minorité turque.
Le parti Mouvement pour les droits et libertés (DPS), principal défenseur des intérêts de ce groupe ethnique, participe activement à la vie politique bulgare. Je ne cacherai pas que les relations avec la Turquie au cours des dernières décennies se sont développées en flux et reflux. Elles sont reparties presque de zéro après ce que l’on appelle le « Processus de renaissance », lorsque, entre 1984 et 1989, les dirigeants de l’ancien Parti communiste ont changé les noms de centaines de milliers de citoyens bulgares d’origine turque. Ce crime a perturbé les relations de bon voisinage pendant, disons, une période de 10 à 15 ans.
Les choses ont changé avec l’arrivée au pouvoir du DPS (dans les gouvernements de coalition) dans la première décennie du XXIe siècle. Tout cela a réchauffé les relations bilatérales. Cependant, elles n’étaient pas entièrement normalisées. Peut-être y a-t-il eu une tension éphémère au cours des premières années après la victoire électorale de Recep Erdogan, lorsque certains cercles du parti au pouvoir, celui de la Justice et du Développement (AKP), rêvaient la restauration de l’Empire ottoman. On est même allé jusqu’à expulser des diplomates des deux pays lorsqu’un ancien ambassadeur turc a osé participer à la création de partis politiques en Bulgarie (le parti politique Dost).
À mon avis, Ankara est désormais bien consciente que cette approche est contre-productive, surtout quand on voit que le DPS ne partage pas la vision islamiste de l’AKP. Pour le moment, je dirais que les relations sont normales et que les formes les plus pragmatiques sont recherchées au niveau économique, commercial, éducatif et culturel. Permettez-moi de rappeler que la frontière bulgaro-turque est la frontière terrestre la plus fréquentée d’Europe. Elle occupe seulement la deuxième place au monde après celle entre les États-Unis et le Mexique.La guerre en Ukraine a grandement atténué l’escalade d’éventuels problèmes bilatéraux, dans la mesure où l’agression russe constitue un test pour les deux États de la mer Noire. Le principal problème reste la pression migratoire, qui vient principalement de la Turquie. Nous travaillons ensemble pour le résoudre.
La Bulgarie entretient traditionnellement de bons intérêts politiques et économiques avec l’Égypte. C’était comme s’ils étaient plus intenses sous le président Gamal Abdel Nasser, mais cela était motivé par les relations idéologiques de l’ancien bloc communiste avec des dirigeants anti-occidentaux tels que Nasser. Nous avons désormais une relation pragmatique dans laquelle il existe suffisamment de potentiel économique à exploiter. À mon avis, le commerce bilatéral de 823 millions de dollars ne reflète pas ce potentiel, même si pour 2022 il a augmenté d’environ 40 %.
La Bulgarie a des relations privilégiées avec l’État du Qatar. Les relations ont été établies dès 1990, mais l’impulsion a été donnée en 2009 par le président bulgare Georgi Parvanov (ancien leader du Parti socialiste bulgare). Il a surmonté la peur (en tant qu’ancien communiste), « d’ouvrir la porte » du Golfe Persique. Sa thèse politique interne sur le « grand coup énergétique» (le gazoduc South Stream avec la Russie, la centrale nucléaire de Belene encore avec la Russie et l’approvisionnement en gaz liquéfié du Qatar) de la Bulgarie était liée au développement des relations économiques bulgaro-qatariennes. Dans le cas du Qatar, les liens sportifs traditionnels entre les deux pays ont joué un rôle important. Еn 2001 l’équipe d’haltérophilie du Qatar, composée de l’équipe « B » de Bulgarie, ont apporté la gloire au petit pays sur le podium mondial. L’ex-pays communiste, en pleine crise économique a l’époque, avait un besoin urgent de l’argent qatari. Pendant une période suffisamment longue, la Bulgarie a privilégié ses relations avec le Qatar en tant que représentant de cette région riche en pétrole et en gaz. Même en 2017, au plus fort de la fracture entre Doha et ses adversaires à Riyad, au Caire, à Manama et à Abou Dhabi, Sofia semblait se ranger du côté du Qatar. Cependant, cela est passé, car le Qatar est également rapidement revenu dans la famille arabe.
Le schéma de développement des relations avec le Royaume d’Arabie Saoudite est similaire. Elles ont été établies dès 1995, mais ne se sont matérialisées par l’ouverture d’ambassades qu’en 2015. La partie la plus active dans ce processus était l’Arabie Saoudite. Les clichés idéologiques du passé ont longtemps empêché certaines institutions bulgares (en dehors du ministère des Affaires étrangères) de surmonter les préjugés du communisme et de donner le « feu vert » à des relations politiques et surtout économiques mutuellement avantageuses. Certains cercles à Sofia continuent de considérer l’Arabie Saoudite comme un bastion de l’islamisme et non comme un pays en développement actif doté d’une attitude stratégique politique, économique et militaire considérable, luttant contre le radicalisme religieux et l’extrémisme. L’hésitation de Sofia dans le développement des relations avec Riyad montre le manque de flexibilité par rapport à celle montrée par Bucarest, avec laquelle nous essayons d’être en résonance. Contrairement à la Bulgarie, la Roumanie n’a jamais pas rompu ses relations avec Israël et en même temps a envoyé son ambassadeur à Riyad près de 20 ans plus tôt que Sofia.
Actuellement, la Bulgarie développe des relations économiques et politiques prioritaires avec ce royaume du Moyen-Orient et le niveau des échanges commerciaux augmente constamment. En 2021, il se situe au niveau insatisfaisant de 313 millions de dollars, bien qu’il ait augmenté de 90 % en un an seulement.
À l’époque soviétique, la Bulgarie participait activement aux affaires régionales. Par exemple, dans les années 1960, la Bulgarie a envoyé des travailleurs et des conseillers en Irak, tandis qu’en 2003, le contingent bulgare a participé à l’invasion américaine de l’Irak. Sofia utilise-t-elle ses liens avec la région créées à l’époque soviétique ? Si c’est le cas, comment?
Nous avons déjà parlé de la présence économique de la Bulgarie dans les pays du Moyen-Orient à l’époque communiste. L’accent a été mis sur la Libye et l’Irak, car ces deux pays, grâce à leurs importants gisements pétroliers, étaient les mieux placés pour payer les salaires des Bulgares qui travaillaient dans leurs entreprises. Cependant, le commerce avec eux se faisait à crédit et de nombreuses compagnies bulgares n’ont pas pu obtenir l’argent qui leur était dû au moment où le pays en avait le plus besoin.
À la fin des années 1990, la Libye devait environ 800 millions de dollars à la Bulgarie, qu’elle a progressivement payés, selon Tripoli. Les 54 millions restants ont été déduits du soi-disant «impôt sur le sang» des médecins bulgares, injustement condamnés par le tribunal de Bengazi pour avoir infecté avec SIDA 300 enfants libyens. À l’époque de Saddam Hussein, la dette de l’Irak envers la Bulgarie atteignait plus de 1,3 milliard de dollars. Après le renversement du dictateur, la Bulgarie a réussi, grâce à de nombreux efforts, à récupérer environ 370 millions de dollars.
C’est en grande partie grâce à la faveur des nouvelles autorités de Bagdad et grâce au fait que la Bulgarie a envoyé un contingent militaire en Irak dans le cadre de la « coalition des volontaires ». En Irak, il y a trop de résidents locaux diplômés des universités bulgares. Rien quе seulement en 1993, il y avait plus de 1 000 étudiants irakiens qui ont soutenu leur thèse doctorale en Bulgarie. Selon mes modestes calculs, jusqu’en 1989, plus de 10 000 jeunes arabes avaient obtenu leur diplôme universitaire en tant que boursiers de l’État bulgare.
Cependant, ce contingent reste en réserve passive pour la mise en œuvre d’une politique active dans ces pays. Sofia, craignant peut-être pour la sécurité de ses diplomates, n’a pas encore élevé le niveau de sa représentation diplomatique à Bagdad depuis avant 2003. Actuellement, il y a un bâtiment d’ambassade, un diplomate qui n’a pas le rang d’ambassadeur et la sécurité locale. À un moment donné, en guise de réciprocité, Bagdad a également abaissé le niveau de sa représentation à Sofia. Nous n’avons toujours pas de représentation diplomatique en Libye. Une telle politique est totalement contraire à la politique des partenaires de l’Union européenne, qui développent depuis longtemps des relations économiques actives avec ces États membres de l’OPEC.
Les liens économiques facilitent souvent un meilleur engagement politique. Comment décririez-vous la coopération économique entre la Bulgarie et les pays MENA ? Quels sont les principaux partenaires de Sofia dans cette région ?
J’ai en déjà parlé, mais d’’une manière générale, je voudrais souligner que le niveau de coopération économique entre la Bulgarie et les pays de la région MENA n’est pas satisfaisant. Certains experts arabes ont raison en disant qu’en adhérant à l’Union européenne, une grande partie de la circulation de marchandises, de capitaux, de services et de travailleurs bulgares s’est dirigée vers elle et les anciens canaux et partenaires traditionnels ont été oubliés. Le volume des échanges commerciaux avec l’UE est similaire en termes de pourcentage à celui que la Bulgarie avait avec l’URSS et les pays arabes avant les changements politiques. C’est une erreur que j’espère que le gouvernement de Sofia corrigera rapidement.
Les habitants du Moyen-Orient se souviennent encore des merveilleux produits laitiers bulgares (fromage, fromage jaune, etc.), de la purée de tomates et d’autres produits agricoles. Même la Hongrie, pendant un certain moment, quand les produits bulgares ont complètement disparu a tenté d’imiter les qualités du fromage bulgare. Les marchands turcs ont également tenté de vendre du « fromage bulgare », mais les consommateurs arabes ont rapidement découvert la différence. Les principaux partenaires de la région sont l’Égypte, la Jordanie, le Qatar, les Émirats arabes unis ( dans ce pays habite la plus grande communauté bulgare dans le monde arabe – plus de 65 000 personnes), le Koweït, l’Algérie et le Maroc. Le commerce avec l’Arabie Saoudite prend de l’ampleur. De gros efforts sont déployés pour restaurer les anciens marchés.
La Bulgarie a été l’un des premiers pays à faire face à la crise migratoire depuis 2015. La question migratoire reste importante, en particulier avec la plupart des migrants du Moyen-Orient transitant par la Turquie via votre pays vers d’autres pays de l’UE. Comment votre gouvernement gère-t-il la migration clandestine ? Existe-t-il des initiatives bilatérales ou multilatérales visant à lutter contre la migration illégale en provenance du Moyen-Orient ?
Il s’agit d’un sujet très sensible pour la Bulgarie, puisque l’immigration clandestine est citée par les Pays-Bas et surtout par l’Autriche comme une raison pour maintenir leur veto à l’adhésion de notre pays à l’espace Schengen. En Bulgarie, nous prenons cela très mal, car les accusations de franchissement facile de la frontière bulgaro-turque ne correspondent pas à la vérité.
A cet égard, il convient de noter que plusieurs policiers et gardes-frontières bulgares ont été tués en exerçant leurs fonctions en arrêtant les migrants. Depuis 2011, la Bulgarie a répondu aux critères techniques, mais pour des raisons de politique purement intérieure, les deux gouvernements persistent. Par ailleurs, dans son dernier discours sur l’état de l’Union de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen a souligné que « la Bulgarie et la Roumanie appartiennent à l’espace Schengen parce qu’elles représentent un modèle en matière de combat contre l’immigration clandestine ». La Bulgarie travaille avec ses partenaires européens et les institutions concernées, dont FRONTEX, pour trouver la formule la plus efficace pour arrêter ou réduire l’intensité du flux de migrants.
En 2022, l’UE a accordé a la Bulgarie une nouvelle aide financière supplémentaire pour l’achat d’appareils techniques plus avancés, ainsi que pour la construction de nouvelles routes autour du mur à la frontière bulgaro-turque. Le gros problème, cependant, est que l’UE elle-même n’a pas de politique unifiée sur cette question. La Bulgarie remplit strictement ses obligations dans le cadre de l’accord conclu en 2016 par Bruxelles avec Ankara pour le retour des migrants illégaux du territoire européen.
Par ailleurs, la Bulgarie travaille très activement avec la Turquie voisine, ainsi qu’avec la Grèce voisine, au retour des migrants qui ont traversé illégalement la frontière vers notre territoire. Des réunions périodiques des représentants des forces de l’ordre de ces trois pays sont organisées afin de s’opposer le plus efficacement possible aux trafiquants et tous les participants au commerce criminel avec les migrants.
En 2023, la pression migratoire a augmenté de plus de 100 % par rapport à 2022. Cela épuise dans une très large mesure les ressources matérielles et humaines du pays. C’est la chose la plus insultante pour nous, les Bulgares, lorsque des gouvernements comme ceux d’Amsterdam et de Vienne ne respectent pas nos efforts et nos résultats prouvés. Je ne veux pas entrer dans les détails à ce sujet, mais il est probable que le comportement ferme de la Roumanie soit le meilleur moyen de résoudre cette situation désagréable.
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