Introduction et problématique :
Si on pose la question à un enfant sur l’étendue de son amour à sa mère : il ouvrira ses bras largement et dira : « comme l’étendue du ciel ». Cette absoluité (généralisation) dans le jugement on la trouve chez l’adulte en disant « je t’aime très fort ».
On pourra dire qu’il s’agirait d’une métaphore et l’exagération signifie la confirmation, et cela dépend de la capacité de l’individu à s’exprimer dans le domaine linguistique. Il s’y soumet en disant : Le chocolat est la chose la plus délicieuse tandis que l’adulte dit : Al-Mutanabbi est le plus grand poète de l’histoire.
Les absoluités (généralisations) continuent dans les jugements selon les contextes linguistiques, acoustiques, sémantiques et de conjugaison. Ces contextes dissimulent des modalités culturelles, qui peuvent être démantelés, étant donné qu’il s’agit d’une matière créée par l’esprit dans un moment historique précis, ayant formé une culture de rassemblement, et elle devint une autorité législative, selon Bart1. Et le rôle de la langue est de signer et de trouver la loi pour cette autorité inaperçue. Mais les domaines de sa réalisation, varient entre les absoluités d’adultes et celles des enfants.
Les absoluités des enfants sont générales dans toutes les langues et elles leur font posséder le monde, tandis que celles des adultes reflète l’image à laquelle s’identifie cet enfant quand il devient un adulte dans une société donnée.
Nous étudierons ces absoluités en tant que signes sémiologiques dans leur réalité sociale, à travers la question :
Comment la langue, en tant que loi confirmant l’autorité de la langue, peut-elle être un obstacle devant le développement naturel de l’appropriation par l’enfant de son monde ? Et quelle culture dans laquelle ces absoluités persistent dans le déni permanent de la vérité, de la relativité et le traitement avec l’autre ?
Premièrement : l’appropriation par l’enfant de son monde dans l’espace spatial et ses conséquences :
L’enfant cherche, par des absoluités ou en faisant des gestes de ses mains, de s’approprier ce que lui appartient, il dit donc : Ma mère est à moi, le jeu est à moi. La marque (mon) est générale chez l’enfant, innée qui résiste à l’indépendance de la mère en s’accrochant à une partie du monde, un déni de participation, avant de s’intégrer par le déni de négation/participation aux lois et aux coutumes de la société. Mais ce qui se passe dans les sociétés arabes, c’est le fait de le désintégrer par la force de cette appropriation naturelle, en lui disant : (Tu es un homme) : Cette absoluité déterminera pour lui ce qu’il sera, et lui ôtera la possibilité d’être une femme. Non pas pour déterminer son sexe biologique, mais pour déterminer sa sexualité par le comportement, et imposer une valeur que ce groupe porte à travers ses langues, comme l’affirme Pierre Bourdieu2. Parce que la culture de la société, avec sa référence patriarcale, est l’autorité, elle impose les lois de la dépendance et de l’hiérarchie dans les relations.
Cette absoluité partage en tant que message de discours, le pouvoir des propos, de l’enthousiasme et du langage corporel, pour exprimer une culture tribale, soit religieuse, éducative ou militaire, autant d’idéologies émettrices de violence verbale/symbolique. C’est la face cachée de l’autorité du système patriarcal et de sa centralisation dans la langue. Le rôle de l’enfant est porté et porteur de cet héritage, car il est le petit homme, l’extension par son nom de son grand-père et de son clan, ou le porteur du rêve n’étant pas réalisé de ses parents opprimés.
La domination masculine se poursuit dans la culture traditionnelle, en déniant l’autre, et son humanité, en lui donnant des jouets caractérisés par la violence et le mouvement. L’enfant dit dans son discours égocentrique, selon Jean Piaget3, en parlant à ses jouets : (Je détruirai, j’interdirai, je gagnerai…) en imitant son père ou tout personnage qui l’influence.
On le retrouve, plus tard, en train d’harceler physiquement et verbalement, essayant d’imposer l’hiérarchie à ses pairs, au comportement de ses sœurs et même de sa mère. Cette référence lui permet le contrôle et la domination ternie. Il devient ainsi dépendant, qui table sur le genre, dégageant ses émotions vers l’extérieur, dans sa prétendue appropriation de son corps.
Quant à l’enfant qui est placée dans la zone de déni, où son être n’existe pas, elle est soumise à une contradiction entre le sacré qu’elle doit conserver parce qu’elle ne le possède pas, et son désir interdit de le découvrir par les tabous de la société. Tantôt ils la couvrent, tantôt ils la possèdent forcément depuis l’âge de l’infanticide jusqu’à maintenant, alors elle dit par ses mots égocentriques en parlant à sa poupée : (je vais nettoyer, je vais arranger…) se préparant pour son futur rôle, exilée en elle-même, dirigeant ses émotions à l’intérieur à travers des rêves dans lesquels elle décore son oppression conditionnelle et son exil.
Deuxièmement : L’appropriation de l’enfant de son monde dans l’espace de communication et ses conséquences :
L’enfant communique avec son monde avec des mots absolus qui se définissent plus tard, que on peut les classer dans nos sociétés par des dénis tels que : (le pitch) tout ce qui fait peur. Et le groupe d’acceptation comme : (Coco) tout ce qui vole.
Ces absoluités affectent l’esprit et l’imagination de l’enfant à la lumière de la culture de l’invisible qui se consacre par la détermination du destin. Le croque-mitaine en tant que signe sociologique lié à l’obscurité, ou des caractéristiques données pour former une barrière psychologique et une névrose affectant sa stabilité et l’équilibre de sa personnalité plus tard.
Parole de Coco : Il va étudier ses critères à l’école à travers le principe de connaissance des choses, mais ce qui se passe, c’est la séparation entre les classes scolaires sur la base du sexe biologique en référence au genre. Et les programmes viennent pour se concentrer sur les méthodes et les stratégies au détriment de la matière éducative. On constate en effet les sorts comme l’inversion des concepts pour exprimer un contexte culturel régi par la dominance politique militaire et religieuse comme les mots : (sécurité, monsieur), et réduisant les concepts intellectuels à des définitions qui ne servent pas le processus de développement social et ne sont pas fidèles à l’origine de ces concepts tels que : (démocratie, mathématiques, identité) et la glorification d’un passé, d’un parti, ou d’une identité pré-étatique avec sa référence fondamentaliste, et ses exemples dans la langue arabe sont nombreux comme la division des paroles et des temps du verbe et l’utilisation des dérivés.
Les règles deviennent en effet loin de l’inspiration et de la créativité des élèves, ils recourent donc à la mémorisation sans créer des contextes qui s’ouvrent sur des modèles culturels susceptibles d’être développés, et la vie forcée et les aliénations multiples selon le système patriarcal imposent un intérêt pour les résultats sans pour autant s’intéresser à ce que leurs enfants apprennent, mais plutôt leurs notes. Cela encourage le modèle de la culture de se débrouiller et de la corruption.
Troisièmement : L’appropriation de l’enfant de son monde dans l’espace interactif et ses conséquences :
On veut dire là l’émotion, l’interaction et le jugement avec qui l’enfant communique dans son espace spatial, cet espace est préalablement régi par de multiples structures économiques, culturelles et sociales.
Si l’enfant/e s’énerve, il pleure et se fâche, ou il émet un jugement : je t’aime autant que le ciel, le chocolat est la meilleure chose. Ces absoluités sont souvent accompagnés de signes symboliques ou les manières de l’avoir en elles-mêmes sont significatives, et cela est tout à fait normal en raison de la formation de la conscience personnelle et du jugement interne, qui détermineront la nature et l’indépendance de la personnalité, mais l’oppression par ses types de mise en garde et prohibitif, l’enfant est privée de ces absoluités naturelles. Quand on dit ne pleure pas, c’est le fait de nier de s’exprimer ainsi, et stéréotyper cette situation avec une référence patriarcale qui lui impose un comportement conforme à la tradition culturelle dominante. C’est-à-dire l’acte de pleurer est réservé aux faibles et non pour les hommes, tandis que la femelle est faible et elle est consolée quand elle pleure. Cela fait que le mâle réprime ses émotions selon les critères de vice et de halal.
Ces absoluités dérapent conformément à l’idéologie dominante pour que le mot « bon » soit déterminé par le goût général régional, tribal ou ethnique dominant, et les jugements deviendront soumis à cela.
Pour constater que selon l’isolement idéologique résultant d’une persécution, les comportements, le dialecte et les coutumes sont modulés, il n’est donc pas surprenant que quelqu’un dit : Al-Mutanabbi est le plus grand poète ou c’est le plus grand président, pour exprimer une harmonisation totale entre la conscience d’une personne et les valeurs résultant du système culturel dominant.
Cela est la cause et le résultat de ce qu’est notre être humain actuel, avec toutes ses réactions et mécanismes défensifs, le visage spécifique de son aliénation, l’image déformée de son identité et la réalité de son existence humaine.
Et quand le degré de l’humanisme augmente dans les institutions et de leurs lois, ces absoluités évoluent naturellement à travers un individu unique, créateur, ce qu’il devrait être réellement. Dans le cas inverse, nous l’avons constaté à travers les conséquences de l’appropriation dans nos sociétés arabes.
Références :
- Roland Barthes, leçon de sociologie, traduit par : Abdel Salam ben Abdelali, Dar Toubkal, Casablanca, Maroc, troisième édition, 1993, p.12.
- Pierre Bourdieu, La Violence symbolique, traduit par Nazir Nouefal, Centre Culturel Arabe, première édition 1994, p.73
- Jean Piaget, la Langue et la pensée chez l’enfant, traduit par : Dr Ahmed Ezzat, Bibliothèque égyptienne Al-Tahda, 1954.