Après des semaines de flirt turc et de déclarations d’apaisement envers le Caire, les contacts turco-égyptiens ont réalisé des progrès tangibles et sont entrés dans une nouvelle étape de reconstruction des relations entre les deux pays, après avoir traversé par des stades compliqués pendant des années à cause de plusieurs dossiers dont notamment le dossier des Frères musulmans, classés par l’Égypte une «organisation terroriste».
Le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a annoncé qu’une délégation turque se rendra en Égypte début mai prochain en réponse à une invitation de la partie égyptienne, avec la possibilité qu’il y ait des visites réciproques dans la prochaine période.
Une nouvelle ère..
L’agence officielle turque Anadolu a rapporté les propos de Mevlut Cavusoglu : « Une nouvelle étape commencera en termes des relations avec l’Égypte, et des visites réciproques auront lieu, et il y aura une réunion avec l’Égypte au niveau des assistants des ministres des Affaires étrangères et des diplomates, et un ambassadeur sera nommé », en ajoutant que « la date n’a pas encore été décidée, et nous pouvons en discuter au cours de la prochaine étape ».
De plus, le ministre turc des Affaires étrangères a profité du mois de Ramadan pour s’entretenir avec son homologue égyptien, Sameh Choukri, pour le féliciter pour l’avènement du mois saint. En effet, les observateurs voient dans l’appel téléphonique une nouvelle tentative d’Ankara de se rapprocher de l’Egypte.
Dernièrement, la Turquie a commencé à changer son discours autour des relations avec l’Égypte, alors qu’elle adoptait auparavant un ton tendu, et elle a parlé de l’existence des contacts de renseignements et diplomatiques avec l’Égypte, malgré les rapports indiquant des difficultés rencontrées lors des pourparlers.
De son côté, le ministre égyptien des Affaires étrangères, Sameh Choukri, a déclaré après l’appel de son homologue turc, que «la conversation téléphonique s’inscrivait dans le cadre de la courtoisie diplomatique pour le féliciter du mois de Ramadan, et nous devons la prendre dans le cadre de toutes les déclarations et les signaux émis par la partie turque concernant l’importance des relations avec l’Égypte et la nécessité de corriger le processus», en expliquant que « ces pas sont appréciés par l’Égypte ».
Les relations entre l’Égypte et la Turquie ont connu une rupture pendant plus de 8 ans, en raison de plusieurs dossiers, notamment la politique d’Ankara en Méditerranée, le fait d’abriter les Frères musulmans et la crise libyenne.
Le Gaz de Méditerranée
En outre, des sources turques informées autour des pourparlers ont indiqué aux médias que «ce qui entrave un progrès concret est la différence de priorités entre les deux parties, puisque Ankara se focalise vivement sur l’avancement des discussions diplomatiques et politiques avant d’aborder des dossiers importants au niveau de sécurité nationale, tandis que le Caire se concentre sur les dossiers des Frères musulmans et des médias, et ne montre aucun enthousiasme en ce qui concerne l’avancement des autres dossiers à l’heure actuelle.
Les sources turques affirment qu’«Ankara souhaite à ce stade renforcer les contacts politiques autour du dossier libyen pour s’assurer que toutes les préoccupations égyptiennes concernant les développements militaires et politiques en Libye sont prises en considération, et travailler plus rapidement pour signer un accord de délimitation de des frontières maritimes entre les deux pays dans la Méditerranée, et cela représente une grande priorité pour la Turquie.
L’insistance de la Turquie de rétablir les relations est considérée par les analystes comme étant liée à la question du gaz de l’est de la Méditerranée, notamment que la Turquie veut sortir de «l’isolement» qu’elle vit au Moyen-Orient et en Europe, et que le gaz est devenu une carte qui définit ses politiques et impose ses orientations.
Des médias ont rapporté selon des sources diplomatiques qui avaient déclaré plus tôt que «le respect de l’Égypte pour le plateau continental de la Turquie dans l’enchère proposée d’exploration pétrolière et gazière dans l’est de la Méditerranée ne signifie pas qu’elle cherche à se rapprocher de la Turquie telle qu’elle est commercialisée. En fait, le Caire, dès le début, essaie d’éviter d’entrer en conflit ou dans des batailles qui ne sont prioritaires, d’autant plus qu’il ne veut pas faire partie des conflits des tiers sans un vrai prix à gagner.
L’Égypte a récemment annoncé un appel d’offres pour l’exploration d’hydrocarbures (pétrole et gaz) à l’est de la Méditerranée, en tenant compte des limites du plateau continental annoncées par la Turquie aux Nations Unies, tandis que le ministre turc des Affaires étrangères a souligné qu’«En fonction de l’avancement des relations, nous pouvons négocier avec l’Égypte sur les zones des prérogatives maritimes et signer un accord dans ce sens. Et les offres d’exploration présentées par l’Égypte respectaient le plateau continental de la Turquie, et Ankara a vu positivement cette décision.
Les analystes indiquent également que «à la lumière de tous ces changements, une grande évolution a été enregistré en Égypte, dont son gouvernement a conclu un accord pour la démarcation des frontières maritimes avec la Grèce, qui était une tentative pour annuler l’accord turco-libyen. Le Caire a récemment publié une carte reflétant sa reconnaissance de l’autorité maritime de la Turquie, selon l’interprétation des experts ».
Il est à évoquer que les pourparlers sur l’est de la Méditerranée ont été arrêtés en 2016, dans un contexte d’escalade des tensions entre la Grèce et la Turquie, les deux pays de l’Organisation de l’OTAN, à la lumière d’une crise diplomatique grandissante il y a des mois suite à l’accusation d’Ankara par Athènes de forer dans ses eaux territoriales.
Les Frères musulmans et les canaux médiatiques
En revanche, la partie égyptienne a insisté sur le fait de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures égyptiennes, et le dossier d’extradition des personnes recherchées pour les juger demeure l’un des obstacles les plus importants auxquels sont confrontées les discussions entre les deux parties, selon l’ancien assistant du ministre égyptien des Affaires étrangères, l’ambassadeur «Hani Khalaf».
«La Turquie a répondu favorablement à la demande de l’Égypte concernant les outils médiatiques hostiles, et un certain nombre des trois outils médiatiques, présents en Turquie et en Égypte,ont été arrêtés», a affirmé Khalaf.
Des sources proches des pourparlers turcs ont affirmé aux médias arabes que «la partie égyptienne exprime sa volonté d’aborder tous les dossiers et confirme son intérêt à discuter du dossier libyen et des frontières maritimes, mais elle insiste à ce stade pour présenter des revendications liées à la Organisation des Frères musulmans et la présence de certains éléments en Turquie, ainsi qu’elle montre une grande priorité pour la pression sur les médias d’opposition diffusant depuis Istanbul pour tenter de les arrêter définitivement.
La source précise que «la Turquie suit et voit les médias égyptiens dirigés directement et indirectement et lancer des campagnes médiatiques massives et quotidiennes contre elle, mais elle n’attache pas une grande importance à cette question, et donne la priorité aux dossiers liés à la sécurité nationale des deux pays et elle croit que les attaques médiatiques diminueront naturellement avec l’amélioration des relations et la diminution des différences. Mais en face, le Caire traite contrairement avec ce dossier et se concentre uniquement sur les médias et le dossier des Frères musulmans, et n’accorde pas la même priorité aux dossiers politiques.
À leur côté, les autorités turques ont informé les chaînes d’opposition égyptiennes de la nécessité de revoir leur politique éditoriale et de tempérer leur discours contre le régime égyptien, et il y a quelques jours, deux des principaux présentateurs de programmes d’opposition ont annoncé la suspension de leurs programmes, un pas considéré décidé suite aux nouvelles pressions auxquelles ces chaînes ont été soumises pour arrêter leur critique du régime égyptien.
Des sources bien informées ont révélé la semaine dernière que ses dirigeants du groupe des « Frères musulmans » se sont réunis dans la capitale britannique, Londres, pour parler principalement de la question du rapprochement turco-égyptien et ses répercussions sur les dirigeants du groupe résidant sur le territoire turc, et la préparation aux répercussions d’une éventuelle réconciliation et la possibilité de livrer certains membres des Frères musulmans aux autorités de sécurité au Caire.
Les sources ont souligné que ces réunions ont conduit à plusieurs perceptions autour de la crise des résidents en Turquie, dont le fait d’assurer aux condamnés de peines de mort ou à perpétuité d’autres refuges en dehors de la Turquie, dans des pays qui n’ont pas d’accord avec l’Égypte pour échanger des criminels. , tandis que ceux condamnés avec des peines simples allant de 3 à 7 ans, une coordination est en cours avec les autorités turques pour leur permettre la résidence temporaire.